Page:Mérimée, Lettres à une inconnue 2,1874.djvu/43

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n’avez jamais rien vu de pareil depuis l’invention de la crinoline.

Je lis ici les Mémoires de Catherine II que je vous prêterai à mon retour. C’est très-singulier comme peinture de mœurs. Cela et les Mémoires de la margrave de Baireuth donnent une étrange idée des gens du XVIIIe siècle et surtout des cours de ce temps-là. Catherine II, lorsqu’elle était mariée au grand-duc qui fut depuis Pierre III, avait une quantité de diamants et de belles robes de brocart, et, pour se loger, une chambre servant de passage à celle de ses femmes, qui, au nombre de dix-sept, couchaient dans une seule autre chambre à côté de la reine. Il n’y a pas aujourd’hui une femme d’épicier qui ne vive plus confortablement que ne faisaient les impératrices d’il y a cent ans. Malheureusement, les Mémoires de Catherine s’arrêtent au plus beau moment, avant la mort d’Élisabeth. Cependant, elle en dit assez pour donner les plus fortes raisons de croire que Paul Ier était le fils d’un prince Soltikof. Ce qu’il y a de curieux, c’est que le manuscrit où elle conte toutes ces belles choses était adressé par elle à son fils, le même Paul Ier. J’ai appris