Page:Mérimée - Carmen.djvu/149

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plus de deux ans. Jadis c’était un des favoris de mademoiselle Joséphine et un des attentifs de sa maîtresse. Neveu d’un ami intime de madame de Piennes, on le voyait sans cesse chez elle autrefois, à la suite de sa tante. D’ailleurs, c’était presque la seule maison sérieuse où il parût. Max de Salligny avait le renom d’un assez mauvais sujet, joueur, querelleur, viveur, au demeurant le meilleur fils du monde. Il faisait le désespoir de sa tante, madame Aubrée, qui l’adorait cependant. Mainte fois elle avait essayé de le tirer de la vie qu’il menait, mais toujours les mauvaises habitudes avaient triomphé de ses sages conseils. Max avait quelque deux ans de plus que madame de Piennes ; ils s’étaient connus enfants, et, avant qu’elle fût mariée, il paraissait la voir d’un œil fort doux. — « Ma chère petite, disait madame Aubrée, si vous vouliez, vous dompteriez, j’en suis sûre, ce caractère-là. » Madame de Piennes, — elle s’appelait alors Élise de Guiscard, — aurait peut-être trouvé en elle le courage de tenter l’entreprise, car Max était si gai, si drôle, si amusant dans un château, si infatigable dans un bal, qu’assurément il devait faire un bon mari ; mais les parents d’Élise voyaient plus loin. Madame Aubrée elle-même ne répondait pas trop de son neveu ; il fut constaté qu’il avait des dettes