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Page:Mérimée - Carmen.djvu/184

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dame de Piennes remarqua que la malade toussait beaucoup, lui rappela que le médecin lui défendait de parler, et, s’adressant à Max, lui dit qu’il ferait mieux de faire une petite lecture que de fatiguer Arsène par ses questions. Aussitôt Max prit un livre avec empressement, et s’approcha de la fenêtre, car la chambre était un peu obscure. Il lut sans trop comprendre. Arsène ne comprenait pas davantage sans doute, mais elle avait l’air d’écouter avec un vif intérêt. Madame de Piennes travaillait à quelque ouvrage qu’elle avait apporté, la garde se pinçait pour ne pas dormir. Les yeux de madame de Piennes allaient sans cesse du lit à la fenêtre, jamais Argus ne fit si bonne garde avec les cent yeux qu’il avait. Au bout de quelques minutes, elle se pencha vers l’oreille d’Arsène : — Comme il lit bien ! lui dit-elle tout bas.

Arsène lui jeta un regard qui contrastait étrangement avec le sourire de sa bouche : — Oh ! oui, répondit-elle. Puis elle baissa les yeux, et de minute en minute une grosse larme paraissait au bord de ses cils et glissait sur ses joues sans qu’elle s’en aperçût. Max ne tourna pas la tête une seule fois. Après quelques pages, madame de Piennes dit à Arsène : — Nous allons vous laisser reposer, mon enfant. Je crains que nous ne vous ayons