Page:Mérimée - Carmen.djvu/198

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remarquant qu’il avait à la main un livre dans un étui : — Vous ne lirez pas aujourd’hui, murmura-t-elle faiblement. Madame de Piennes jeta les yeux sur ce livre prétendu : c’était une carte de la Grèce reliée, qu’il avait achetée en passant.

L’abbé Dubignon, qui depuis le matin était auprès d’Arsène, observant avec quelle rapidité les forces de la malade s’épuisaient, voulut mettre à profit, pour son salut, le peu de moments qui lui restaient encore. Il écarta Max et madame de Piennes, et, courbé sur ce lit de douleur, il adressa à la pauvre fille les graves et consolantes paroles que la religion réserve pour de pareils moments. Dans un coin de la chambre, madame de Piennes priait à genoux, et Max, debout près de la fenêtre, semblait transformé en statue.

— Vous pardonnez à tous ceux qui vous ont offensée, ma fille ? dit le prêtre d’une voix émue.

— Oui !… qu’ils soient heureux ! répondit la mourante en faisant un effort pour se faire entendre.

— Fiez-vous donc à la miséricorde de Dieu, ma fille ! reprit l’abbé. Le repentir ouvre les portes du ciel.

Pendant quelques minutes encore, l’abbé continua ses exhortations ; puis il cessa de parler, incertain s’il n’avait plus qu’un cadavre devant lui. Madame de Pien-