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Page:Mérimée - Théâtre de Clara Gazul, 1857.djvu/100

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B. Mustafa. Seigneur !

H. Nouman. Un autre esclave fera ce que veut Zeïn. Toi, va me chercher Mojana. (Mustafa sort.) Le pauvre Zeïn ! son nouvel amour lui a fait perdre la tête. Il voulait troquer Abjer contre cette femme ! Il faut qu’elle ait fait une grande impression sur lui ! Malheur à qui enchérira sur l’esclave ! Zeïn a vendu les pierreries de son khandjar, mais il lui reste encore la lame.

Entre Mojana, conduite par B. Mustafa.

Approche, reine de beauté. Ôte ce voile trop épais. Il n’y a ici que ton seigneur pour contempler tes attraits.

Mojana après avoir ôté son voile. Que veut mon lion ?

H. Nouman. Viens, Mojana, assieds-toi à côté de moi sur ce sofa. — Esclave, apporte la collation. Eh bien ! Mojana, es-tu contente des parures que je t’ai envoyées ?

Mojana. Seigneur, tu as comblé de tes dons ton humble esclave, qui ne sait comment t’en témoigner sa reconnaissance.

H. Nouman. Dans peu tu auras quelque chose de mieux que ces bagatelles.

Mojana. Ah ! seigneur, tant que j’aurai ton amour, je me croirai assez heureuse.  :

H. Nouman. Aimable enfant, je suis riche et puissant. Ma richesse et ma puissance t’appartiennent. Souhaite, et tes souhaits seront exaucés.

Mojana. Ah ! mon lion ! oserai-je te demander une grâce avant de l’avoir méritée ?

H. Nouman. Demande, et tu auras. Ne me demande pas cependant le cheval Abjer de mon ami Zeïn.

Mojana. Seigneur, ton esclave est si heureuse avec son lion, qu’elle n’a plus qu’un seul souhait à former. Je suis née dans un pays que je crois fort éloigné d’ici, près d’une ville que l’on nomme Damas. Mon père était un marchand ; mais, parce qu’il avait manqué d’aller à la Mecque, ainsi qu’il en avait fait vœu, Allah lui a retiré sa faveur. En une année il perdit tout son bien. Mon frère fut tué par les Kurds ; ma mère mourut de maladie. Mon père, pour vivre et faire vivre mes trois sœurs, fut obligé de me vendre 10. Ô mon seigneur ! permets que je leur envoie une