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Page:Mérimée - Théâtre de Clara Gazul, 1857.djvu/121

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Mendo pleurant dans les bras d’Inès. Seigneur ! pourquoi ne lui avez-vous pas donné un autre père !

Inès. Seigneur ! fais que je le conserve longtemps !

Mendo. Tu vois qu’il faut renoncer à celui que tu aimes. Auras-tu le courage de lui écrire pour lui rendre sa promesse ?

Inès. Oui, mon père… je sens que je le dois.

Mendo. Tôt ou tard ils sauront la vérité, de l’alcalde ou d’un autre. Don Esteban est un noble jeune homme. — Parle avec franchise, et dis-lui… qui tu es.

Inès. Que je lui dise !…

Mendo. Dis-lui qu’en t’élevant dans l’ignorance de ta naissance, je fus le seul coupable. Il vaut mieux qu’il l’apprenne de nous que d’un autre.

Inès. Eh bien ! s’il le faut, je le ferai.

Mendo. Écris-lui sur-le-champ. Je te laisse.

il sort.

Inès seule. Comment m’y prendre ?… Oui, dire la vérité sans préambule… Hélas ! c’est encore lui qui m’a donné cet encrier. (Elle écrit.) Peut-être aura-t-il quelque pitié de moi… « Adieu, Inès… » Et toi, mon cher anneau, j’espérais te conserver toute ma vie. Et il faut sitôt nous séparer… Je ne suis plus digne de te porter… Adieu ! adieu ! (Elle le baise à plusieurs reprises.)

Entre don Esteban.

Don Esteban. Ma chère Inès, laissez-moi vous rendre vos baisers.

Inès se sauvant à l’autre bout du théâtre. Ah !

Don Esteban. Ma chère Inésille, je vous ai fait peur ? Rassurez-vous, c’est moi.

Inès de même. Quoi !… c’est vous ?…

Don Esteban. Oui, c’est ton amant qui vient…

Inès. Je n’ai plus d’amant !… Je suis une malheureuse qu’il faut laisser !…

Don Esteban. Te laisser, Inès !… Ne me reconnais-tu pas ?

Inès. Seigneur !… au nom du ciel ! laissez-moi ! laissez-moi ! il le faut.

Don Esteban s’avançant vers elle. Qu’avez-vous ? vous me désespérez. Pourquoi cette frayeur ?

Inès. Ne me touchez pas ! vous allez vous souiller !

Don Esteban. Ce malheureux Mendo lui aura troublé l’es-