Page:Méry - Les Nuits d'Orient, contes nocturnes, 1854.djvu/61

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— Au reste, ajouta le roi des Parthes, cela m’est bien égal, ce soir. On fait un tapage d’enfer aux avant-scènes. Personne n’écoute, on ouvre et on ferme les portes de toutes les loges, sans ménager les serrures ; à chaque instant des députés entrent dans l’avant-scène de Siéyes, et lèvent les bras au plafond. Cela me rappelle le 13 vendémiaire ; je jouais Polynice.

Une voix chevrotante retentit à l’extérieur, et Lainez parut en fredonnant :

xxxxxxxxxxQuel est donc l’ennemi qui brave ma colère ?

— Ils bravent tous quelque chose dans les opéras ! remarqua la danseuse en à parte.

— Citoyen Hoffmann, dit Lainez, est-ce que l’empereur Adrien portait un casque dans sa chambre ?

— Toujours, mon cher Lainez ; un Romain sans casque n’est pas un Romain.

— C’est égal, c’est bien gênant, lorsqu’on n’est pas Romain, ajouta le grand artiste ; quand je jouerai Adrien à Madras, je jouerai tête nue.

— À Madras ! s’écria le chœur des lettrés ; vous allez à Madras ?

— Je viens de signer mon engagement…

— Et moi aussi, — dit Vestris, qui entrait sur la pointe d’une pirouette.

— Et moi aussi ! dit la citoyenne Gardel, dans une attitude de Renommée.

— On me paie mon voyage, dit Lainez, et on me donne