Page:Méry - Les Nuits d'Orient, contes nocturnes, 1854.djvu/63

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civiliser avec des cavatines ! Et ce n’est que le commencement d’une longue histoire ; nous sommes l’avant-garde, nous ; Bonaparte le sait bien ! Tout ce qui chante, déclame et danse, s’envolera vers l’Inde ; c’est le pays des perles, du corail et des diamants, trois choses inventées pour les artistes. Partons.

Le foyer retentit d’un long cri d’enthousiasme la voix du régisseur vint à propos réclamer le silence ; ce tumulte de joie portait le trouble dans la représentation d’Adrien.

Presque au même moment, une armée multicolore descendue des monts Soleïman, de Khordan, de Gundava et des frontières méridionales du Penjaub, au secours de ses religions menacées, se hérissait comme une barrière de bronze devant les soldats de Bonaparte. On allait engager une bataille inouïe, auprès de laquelle toutes les vieilles batailles du Nord, avec leurs sites froids, leurs stratégies compassées, leurs uniformes absurdes, leurs terrains de neige ou de seigles mûrs, sont des jeux d’enfants féroces où la poésie absente ne laisse que l’horreur plate du tableau.