Shah, issus de ses différentes femmes ou concubines, forment un nouvel élément de dissolution. Aspirant chacun, sinon au trône, du moins à une part d’influence, ils profitent de leurs emplois pour se créer à tout prix un parti ; à la mort du Shah, la succession se règle difficilement sans luttes sanglantes. L’ancien système qui consistait à supprimer les princes de la famille royale, s’il était barbare, avait du moins son côté pratique !
L’on voit donc qu’aucun principe ne préside au gouvernement ; chaque fonctionnaire est en quelque sorte un intrus, qui, sans aucune préparation, se trouve favorisé pour quelques instants d’une bonne mine à exploiter. Il ne peut être question d’améliorations sérieuses ; les plus beaux projets ne survivent pas à celui qui les a lancés, en admettant, chose rare, qu’il les ait lancés dans un but sérieux et non pour pêcher en eau trouble.
Rien ne montre mieux la faiblesse du gouvernement que sa conduite vis-à-vis des brigands.
Un brigand kurde, Hassö, chef d’une bande bien organisée, a mis, il y a quelques années, tout le pays d’Ourmiah à contribution. Les 19 canons d’Ourmiah (combien sont en état de tirer ?) ont été mis en ligne ; toute l’armée de l’Aderbeidjân s’est ébranlée ; Hassö s’en est moqué. Pendant que ses hommes battaient les troupes du Shah, lui-même venait tranquillement faire ses provisions à Ourmiah ! De guerre lasse, le gouvernement persan donne à ce même Hassö, avec sa grâce, le titre de colonel et 11 000 krans de pension annuelle !
À peu de temps de là, un autre chef kurde, scheikh Mohammed Abdullah, mit tout le pays d’Ourmiah à feu et à sang et assiégea la ville[1]. Avec un peu plus de résolution, il l’eût prise sans coup férir. Personne n’était préparé à la résistance et la démoralisa-
- ↑ Je crois que l’expédition de Mohammed Abdullah remonte à 1880. Mohammed Abdullah habitait un donjon inaccessible du pays de Soldouz où, dit la voix populaire, les sentiers sont si escarpés que deux hommes résisteraient à une armée. Au lieu de faire une rapide razzia, il assiégea Ourmiah pendant deux mois, et le temps qu’il perdit ainsi permit aux Persans de le battre.