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Page:Maël - Une française au pôle Nord, 1900.djvu/188

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fantastiques aspects. On était le jouet des plus étranges illusions. Tantôt une chaîne de montagnes se dessinait à l’horizon, tantôt on voyait resplendir d’adorables vallées, toutes verdies d’une végétation inconcevable sous de telles latitudes. Le mirage des régions glaciaires est peut-être plus trompeur encore que celui des déserts de sable du Sahara.

Mais, en dépit de ces météores fascinateurs, la présence des basses températures suffisait à rappeler aux voyageurs la réalité de leur situation.

À mesure que l’hiver se rapprochait, la plaine de glace offrait de moins en moins les allées d’eau nécessitant l’emploi des embarcations. On parcourait, à pied sec maintenant, des espaces de 5 à 6 milles sans interruption. Les chiens se montraient dociles, recevant très régulièrement leur pitance. Mais il était manifeste que cette race grœnlandaise esl très voisine de l’état primitif, sinon sauvage, car elle retourne très rapidement à l’instinct du carnassier. Il fallait donc les surveiller de près et ne rien laisser à leur portée qui lut susceptible d’exciter leurs convoitises et de provoquer entre eux des conflits.

L’un des épisodes les plus intéressants de cette marche en avant se produisit un matin, alors que, retenus dans leurs sacs de couchage, par la crainte des gelures d’une bise redoutable, les explorateurs n’étaient pas encore sortis de leurs tentes.

Salvator, qui jouissait de toutes les immunités, et qui, pour cette raison, devait être grandement jalousé par ses congénères, avait déjà secoué le sommeil et ses brumes, et, malgré les 28 degrés au-dessous de zéro du thermomètre, flânait aux alentours du campement.

Une négligence tout à fait involontaire de l’Esquimau Pe-