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Page:Macé - Histoire d'une bibliothèque communale, 1863.djvu/11

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croyait encore aux temps ou La Bruyère pouvait écrire sa fameuse définition du paysan :

« L’on voit certains animaux farouches, des mâles et des femelles, répandus par la campagne, noirs, livides, et tout brûlés du soleil,  etc. »

La révolution française a passé là-dessus. Aujourd’hui le paysan est propriétaire du sol. Il s’est formé une bourgeoisie des campagnes qui envoie aussi ses fils au collège, et qui gémit tout bas de l’insuffisance des ressources d’instruction qu’elle trouve près de sa glèbe, la glèbe moderne, celle à laquelle on s’enchaîne soi-même. Lui mettre en tête la création des bibliothèques communales, c’est la placer sur une voie qui la mènera plus loin qu’elle ne pense, et qui l’écartera chaque jour davantage du chemin des villes, où les jouissances intellectuelles l’attirent peut-être autant que les questions de salaire y attirent les journaliers. Pour cela il est indispensable que les hommes qui comprennent se mettent en avant. Il en est qui se plaignent de ne pouvoir rien faire d’utile en ce moment. Voici quelque chose d’utile à faire, de plus utile qu’on ne saurait le dire dans un article de journal. Et l’on ne peut se retrancher derrière une objection de difficultés à vaincre. Il n’y a nulle opposition à redouter, pas même l’autorisation à demander ; on se rend purement et simplement à une invitation que le gouvernement a faite de lui-même et dans les termes les plus pressants.

J’ai là sous les yeux une circulaire du 30 juin de l’année passée, avec ces mots en vedette : très-urgent, envoyée par le préfet du Haut-Rhin