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Page:Macé - L’Abbé en belle humeur, 1881.djvu/23

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EN BELLE HUMEUR

attendez de moi ? Ormon très étonné, et ne comprenant rien à ces paroles, la pria de se vouloir expliquer autrement. Je veux vous obéir, lui dit-elle, et puisque vous ignorez les chagrins que vous me causez depuis si long-tems, il faut pour ma satisfaction que je me soulage, en vous faisant connoître combien j’en suis touchée. Qu’avez-vous, Monsieur, à vous plaindre de ma conduite, pour me traiter comme vous faites ? Quoi, passer dix heures entiéres dans un silence perpétuel, sans seulement daigner me regarder ? Que vous ai-je fait, de quel crime m’accusez-vous, punissez-moi si je suis coupable, et m’ôtez toute innocente que je suis, plutôt la vie, que de me traiter si indignement. Ormon fut très-satisfait d’entendre sa belle Epouse parler de la sorte ; il attribua ses pleurs et tout ce raisonnement à une extrême passion qu’il crût qu’elle ressentoit pour lui, puisqu’elle l’aimoit avec tant de délicatesse, qu’elle ne vouloit pas lui permettre de penser à autre chose qu’à elle ; et ravi de se voir cheri d’une maniére si tendre, il crût ne devoir pas