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LE CHINOIS

tères, et des arrangements existent quand le supplicié ou sa famille paraissent solvables. C’est amusant, n’est-ce pas ? La publicité joue un grand rôle dans cette affaire comme dans les autres. Les murs de la Cité des Bourreaux sont couverts d’affiches, parfois amusantes, où l’imagination des artistes chinois se donne libre cours.

« Des enseignes ornent et brimbalent à la porte des magasins d’exécutions capitales, tâchant par la qualité du travail annoncé, l’honnêteté des prix, et leur valeur artistique, à récolter la clientèle légère des gibiers de potence consacrés par la loi. « Ici on pend mieux qu’en face » voisine avec « La spécialité des cent morceaux ». « Le décapité prévoyant » fait, en offrant une prime, baisser les prix de la vieille maison « L’écorché économique ». C’est inouï. Vous vous rendez compte, messieurs, de l’effet produit ? Hein ? »

Krühl regardait Oliine avec de petits yeux ronds et les sourcils levés. Il n’ajouta aucun commentaire aux dernières paroles du Russe.

― C’est l’Annamite qui m’a confié ce que je vous raconte. Ce n’est pas un menteur. D’ailleurs de telles choses ne s’inventent pas. Le Chinois habite cette ville, il tient un collège d’élèves bourreaux. Un jeune homme sort de chez lui, connaissant son métier rubis sur l’ongle. Le maître se procure des sujets où il peut, et les préjugés ne l’embarrassent pas. Quand il a fait moisson de