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LE CHANT DE L’ÉQUIPAGE

apercevant Samuel Eliasar, Bonjour, maman Plœdac, vous êtes contente, le voilà revenu, votre poulet de grain, votre oiseau des îles.

Eliasar bâilla. « Lorient ne me paraît pas une ville folâtre », opina-t-il.

― Je vous avais prévenu, dit Krühl. Vous auriez mieux fait de rester avec nous. Nous avons passé, Pointe et moi, deux jours en mer, dans la barque au fils Palourde. Beau temps, premier soleil, de la brise et grand largue. Nous avons pris une peau bleue et tiré des coups de fusil sur les marsouins. Palourde craignait les périscopes, sans cela on allait jusqu’aux Glénans.

― C’est un idiot, insinua Pointe d’une voix suave. Il n’y a pas de sous-marins par ici. Qu’est-ce qu’ils viendraient faire ? Relever des casiers à homards vides et torpiller des coquilles d’huîtres dans le parc à Boutron.

― Oh ! ne dites pas ça, monsieur Pointe, reprit Mme Plœdac. Il y a six mois, vous vous rappelez, c’était bien un sous-marin qu’on a vu passer au large de l’île Verte. Les matelots du sémaphore l’ont bien reconnu.

― Bouh ! bouh ! peuh ! souffla M. Krühl en levant les épaules.

― Mes enfants, déclara Eliasar, je vais me plonger dans le travail jusqu’au menton. Je suis venu ici pour écrire, et je ne me coucherai pas désormais avant d’avoir rempli cinq ou six pages de papier grand format.