Page:Machado de Assis - Mémoires posthumes de Bras Cubas.djvu/306

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que j’ai dit Virgile et non Virgilia… Ne confondons pas.

Et il riait d’un gros rire, bas et frivole. Sabine me regarda ; elle craignait quelque réplique de ma part ; quand elle me vit sourire, elle fit de même et se détourna pour cacher son geste. Les autres personnes présentes me considéraient avec indulgence et sympathie. Il était clair qu’on ne leur avait rien appris qu’ils ne sussent de longue date. Mes amours étaient bien plus connues que je ne pouvais le supposer. Et pourtant je souris, d’un sourire court, fugitif et bavard comme les pies de Cintra. Virgilia était une belle faute, et rien n’est plus facile à confesser. Au commencement, je prenais une mine renfrognée, quand on y faisait allusion. Mais en réalité je sentais au dedans de moi une impression suave et flatteuse. Une fois pourtant, il m’arriva de sourire, et je continuai dans la suite. Comment expliquer ce phénomène ? Pour moi je ne trouve qu’une explication plausible : tout d’abord, mon contentement, étant intérieur, était pour ainsi dire en bourgeon. Avec le temps il s’épanouit en une fleur, et apparut aux yeux de tous. Simple question de botanique.