Page:Machado de Assis - Quelques contes.djvu/26

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intervenir la nature, en trouvant, d’ailleurs sans l’avoir cherchée, une touche vive de couleur locale.

« Il ventait doucement, et les feuilles qui s’agitaient, murmurantes, ces feuilles qui n’étaient plus celles d’antan, se montraient cependant questionneuses. « Dona Paulina, disaient-elles, vous rappelez-vous les jours lointains ? » Car c’est une originalité chez les feuilles : les générations qui vont disparaître racontent à celles qui viennent de naître tous les événements auxquels elles ont assisté, en sorte qu’elles savent tout, qu’elles interrogent sur tout : — « Vous souvenez-vous des jours lointains ? »

Sous la plume d’un écrivain des pays tempérés, ce passage serait absurde ; seul un auteur des pays chauds, où les arbres ne se dépouillent jamais entièrement de leur feuillage, pouvait écrire cette prosopopée, qui ne sort pas d’ailleurs des limites d’une observation générale, sous la plume d’un romancier brésilien.

Rendons-lui cette justice : n’étant point né paysagiste, il eut le bon esprit de s’abstenir,