Page:Machaut - Œuvres, éd. Hœpffner, I.djvu/42

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
XXXIV INTRODUCTION


reux et presque éloquents. Dans le Confort d’ami, Guillaume ne va-t-il pas jusqu’à féliciter le roi de Navarre de son emprisonnement lors de la bataille de Poitiers qui ne lui aurait valu que la mort, la captivité ou la honte de la fuite ? Et lui-même, ne songe-t-il pas à quitter Reims devant la menace d’une invasion anglaise et ne se plaint-il pas des charges onéreuses que nécessite la défense de la ville ? Les malheurs que Guillaume déplore, ce sont ceux dont il a à souffrir personnellement : la peste de 1349 qui le menace de mort, ou les exactions des routiers qui désolent les campagnes françaises et qui l’empêchent, lui, de voyager à sa guise. Nous avons bien un lai où il maudit Fortune qui a livré le roi de France aux mains des Anglais ; mais il est peu probable que ce poème qui ne figure que dans un seul manuscrit, notre ms. E, et qui manque dans les exemplaires les plus complets, A et F-G, soit l’œuvre de Machaut. Guillaume, rimeur aimable et galant, ne se soucie guère plus de la politique que ne le fait un siècle plus tard le plus fameux et le plus doué de ses disciples, Charles d’Orléans. Mais la rupture survenue entre les rois de Navarre et de France mit le poète dans la nécessité d’opter pour l’un des deux partis ; il se décida pour la maison de France à qui appartenaient Reims et la Champagne.

Il est assez probable que Machaut ayant été au service de Bonne de Luxembourg a eu des rapports personnels avec son mari, le roi Jean le Bon ; cependant nous n’en avons pas de preuves certaines. L’abbé Lebeuf, et d’autres après lui, attribuent à Guillaume la charge de secrétaire de ce roi[1]. Mais dans les vers de la Prise

  1. Mém. de l’Acad. des Inscr. et Belles-Lettres, XX, 398.