Page:Madame de Mornay - Memoires - tome 1.djvu/145

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ces entrefaites arriva monseigneur le Prince en Angleterre, sans que monsr du Plessis en fust préaverty, partie conduit de ses premières intentions[1], et partie induit par le duc Casimir qui ne demandoit que de s’en descharger ; lequel, contre l’avis de monsr du Plessis, demanda à la Royne trois cent mil escus, espérant, par l’aucthorité de sa personne, grossir l’effet de sa libéralité, ce qui la rebuta tellement qu’elle s’en refroidit du tout, vint à lui disputer la justice des armes à blasmer le mauvais conseil de ses serviteurs, et l’en renvoya refusé tout à plat. Monsr du Plessis vouloit demeurer après luy pour y relever les affaires, et en estoit conseillé par ses amys ; mais monseigneur le Prince luy commanda absolument de le suivre. Il luy déclara qu’il ne vouloit qu’aucuns François y demeurast avec charge, et luy moins que tout autre, d’autant que la Royne se plaignoit particulièrement de ses déportemens. Qui fut cause qu’il suivit le dit seigneur Prince, et en se départant escrivit à la Royne, se plaignant de ce que dessus, laquelle lui despescha un gentilhomme exprès en poste, avec une lettre en partie de sa main, qui se trouve encor en ses papiers, par laquelle elle reconnoist n’y avoir jamais eu gentilhomme estranger en Angleterre duquel elle fist plus d’estime, n’avoir jamais tenu telz propos, ny mesmes songé, et ne les voulant attribuer à autre occasion, les impute à la surdité du dit Seigneur Prince.

Le dit Seigneur Prince aborda à l’Escluse en Flandres, et de là fut conduit à Bruges et à Gand, où il

  1. D’épouser la reine Elisabeth.