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Page:Maeterlinck - Berniquel.djvu/17

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BERNIQUEL. — Titia !…

TITIA. — Qu’y a-t-il, mon ami ?…

BERNIQUEL. — Regarde-moi en face et les yeux dans les yeux…

TITIA. — Voilà, je te regarde, mon ami…

BERNIQUEL. — Ai-je vraiment la tête d’un incurable imbécile ?…

TITIA. — Pourquoi me demandes-tu ça ?… Que s’est-il passé ?… Tu n’as pas l’air content ?… Qu’est-ce qui te prend ?…

BERNIQUEL. — Ce qui me prend, c’est qu’à la fin j’en ai assez d’être mécanisé comme je le suis en ce moment !… Je suis cocu, soit ! Ce n’est déjà pas mal, mais ce n’est pas extraordinaire ; il n’y a pas de quoi désespérer ou crier au miracle et tout le monde s’y attend plus ou moins ; mais qu’en outre tu te complaises, tu te délectes, tu te dilates à te moquer de moi, pour rien, pour le plaisir de traiter en idiot, de bafouer et de rendre grotesque à ses propres yeux un pauvre diable qui n’a eu qu’un seul tort dans la vie, celui de croire en toi, de t’aimer trop, de mettre en toi tout son bonheur, voilà qui me dépasse, voilà qui me déchire le cœur bien plus