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Page:Magdeleine du Genestoux Le trésor de Mr. Toupie - 1924.djvu/46

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LE TRÉSOR DE M. TOUPIE

Charles ralentit peu à peu : Arthur l’imita.

« Tu as des allumettes ? demanda-t-il vivement.

— Oui.

— Oh ! que tu es étonnant ! » s’écria Arthur, plein d’admiration pour un camarade qui avait pensé aux lanternes et aux allumettes !


CHARLES ET ARTHUR ÉVITÈRENT UNE VOITURE
LANCÉE À FOND DE TRAIN.

Puis, ils reprirent leur course. Ils ne pouvaient plus aller aussi vite, car la nuit était complète maintenant. Charles en lui-même commençait à regretter son équipée.

Ils traversèrent Lillemer. Tout à coup, dans le silence de la nuit, ils entendirent le bruit très lointain d’un grelot. De temps à autre, quand le vent, très faible du reste, soufflait, il résonnait, puis cessait.

« Qu’est-ce que ce bruit ? demanda Arthur.

— Oui… un son de grelot ; la route fait des courbes, c’est pourquoi il ne nous parvient qu’irrégulièrement.

— Écoute : on dirait le roulement d’une carriole.

— Oui… les pas d’un cheval…

— Le bruit se rapproche.

— C’est une voiture de paysan, dit Charles ; fais attention, garde bien la droite… La nuit, quelquefois, les chevaux ont peur et font des écarts… »

La voiture arrivait au grand trot, et bientôt le son des grelots s’entendit très distinctement. Le cheval ne marchait pas droit. Son allure était saccadée tantôt il paraissait aller sur la droite, tantôt sur la gauche. On aurait dit qu’un homme ivre le conduisait.

« Arthur, descendons et restons près de cette borne… il ne s’agit pas d’être accrochés par ces paysans.

— Si nous allions plus vite qu’eux ? proposa Arthur.

— Non, inutile, tu vois bien que ce cheval est au grand trot. »

À peine Charles et Arthur s’étaient-ils garés sur le bord du chemin qu’une carriole passa comme une flèche devant eux. Arthur poussa une exclamation étouffée. À la lueur des deux lanternes qui projetaient une vive lumière, il avait reconnu, dans la voiture, leurs voisins de table de l’hôtel de Saint-Malo !

C’était le « précepteur » qui conduisait. Si l’on peut appeler conduire, diriger un cheval de droite à gauche sur une route.

« Eh ! s’écria Arthur, hardi ! mon vieux. Il s’agit de rattraper ces concurrents, ou au moins de les suivre à peu de distance : il ne faut pas qu’ils visitent le pays avant nous.

— Mon cher, nous avons toute la nuit pour arriver. D’ailleurs, s’ils ne tombent pas dans un fossé ou s’ils n’accrochent pas une borne avant d’atteindre le but de leur voyage, cela m’étonnerait. »

Le bruit de la voiture s’affaiblissait peu à peu et bientôt on n’entendit plus le son des grelots qu’à intervalles.

« Ça va vite, une carriole, même mal conduite ! s’écria Arthur. Nous aurions dû louer une automobile. Nous serions déjà au Mont Dol. »

Des minutes passèrent. Puis, soudain, on entendit une galopade et Charles et Arthur n’eurent que le temps de sauter à bas de leurs machines et de se jeter dans le fossé pour éviter le cheval de la carriole qui s’était emporté et, à toute allure, reprenait le chemin de son écurie, traînant après lui un des brancards de la voiture.

Arthur se mit à rire :