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mela le banquier. Il te donne des rendez-vous à la gare, à présent ? Qu’est-ce que cela veut dire ?

— Cela veut dire qu’il a à me parler et que c’est pressé, riposta Violette, dont les yeux s’étaient subitement séchés.

— Pressé ! Il nous la baille belle ! Pendant un mois, il fait le mort, et tout à coup il faudrait tout quitter pour courir à lui ?

— Sois sûr qu’il n’agit pas sans raison.

— Hum !… Enfin !… je consens à ce que ta mère et toi vous alliez à sa rencontre. Mais, vous me ramènerez le garnement pour que je lui lave la tête.

— Convenu ! fit joyeusement Violette.

Quelques minutes après trois heures, la jeune fille et sa mère se promenaient sur le quai longeant une des voies d’arrivée, en attendant que parût le train annoncé.

Le 106 était un omnibus. Violette l’avait appris avec surprise. Quel coin de banlieue avait pu retenir si longtemps son fiancé ? Pourquoi, étant si proche, n’avait-il pas donné de ses nouvelles ? Tout en croyant connaître la raison, la jeune fille ne s’expliquait ni la longueur de l’absence, ni le silence absolu.

Mais elle allait savoir ; le train entrait en gare.

Au tournant des voies, un panache de fumée avait d’abord surgi, puis la locomotive s’était avancée vers le hall, traînant derrière elle une longue file de wagons. Et, brusquement grossi, tout cela défilait devant les deux femmes, lentement, dans un bruit de vapeur lâchée et de claquements de portières.

Après un heurt dernier, la masse se figea tandis que de ses flancs, par cent ouvertures béant soudain, jaillissaient les voyageurs.

Dans la portière d’un wagon de première classe, une silhouette s’encadra ; une main empoigna solidement la barre de cuivre verticale, destinée à faciliter la descente ; un pied s’engagea entre elle et la paroi et l’hom-