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rois, à la façon d’un bouchon que le marteau enfonce dans le goulot, en forçant.

Projetés soudain les uns contre les autres, en fouillis d’os craquants, de têtes cabossées et de côtes enfoncées, rudement heurtés contre les murs et invinciblement entraînés dans l’escalier-laminoir, les machinistes lâchèrent prise et demeurèrent en tas, sur les marches, tellement empêtrés et meurtris qu’il leur fallut quelques minutes et de l’aide pour se dégager.

Seul, le gorille avait foncé de l’avant et poursuivi son escalade. Comme un ballon délesté remonte d’un bond, en trois sauts, il fut en haut des marches.

Nul, maintenant, ne tentait de lui barrer le passage. Attirés par les cris et le bruit de la lutte, quelques artistes se tenaient sur les portes de leurs loges. Mais, à la vue de la bête monstrueuse, ruée en avant, ils rentrèrent précipitamment et se barricadèrent, en poussant des clameurs d’effroi.

Une seule porte demeura ouverte, celle de la loge que le gorille partageait avec Godolphin. Il y entra et jeta un coup d’œil rapide dans la glace accrochée à la muraille. La lutte qu’il venait de soutenir n’avait pas été sans endommager ses vêtements.

Mais, contre un des murs de la loge, à un porte-manteau, étaient suspendus des vêtements de rechange, en tout semblables à ceux que le gorille portait sur lui ; un huit-reflets les surmontait. C’était un encas, destiné à parer à l’imprévu. Sans perdre une seconde, le gorille rafla le tout, se coiffa du chapeau et sortit de la loge.

Tout cela avait été si rapide que les poursuivants ne se montraient point encore. Peut-être aussi étaient-ils moins pressés de se mesurer de nouveau avec le redoutable singe.

Profitant de cette accalmie, le gorille escalada l’escalier menant aux cintres. Une tabatière ouvrait sur les toits. ; le fugitif la souleva mais se garda bien de prendre ce che-