Page:Maindron - Dans l’Inde du Sud.djvu/62

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sent nonchalamment des trucs. Deux charrettes à bœufs dételées dressent leur timon au-dessus du parapet, où dort le bouvier. Tout, bêtes et gens, paraît figé dans la morne et insouciante apathie de ceux qui ont vu passer tant de maîtres sans avoir jamais changé. Non, rien n’est changé dans ce Pondichéry de jadis, rien, sinon le « Pier », le grand appontement de fer qu’on a mis plus de vingt ans à construire et qui, enfin terminé, permet aux passagers, tant il s’avance au loin dans la mer, de débarquer à pied sec. C’est là un grand progrès, si j’ose dire, de ne plus subir ces insupportables secousses du ressac par lesquelles il fallait passer jadis avant que d’aborder la côte de Coromandel à dos d’homme.

Sur le Pier, j’aperçois tout d’abord une figure amie : Soupou, le vieux Soupou Krichnassamy, scribe retraité de l’ancienne Direction de l’Intérieur, et propriétaire de « l’Hôtel de Paris et Londres », Soupou, qui m’hébergea jadis pendant ma turbulente jeunesse, est, depuis des mois, avisé par ses compatriotes bureaucrates, de ma prochaine arrivée dans l’Inde. Aujourd’hui, à l’entendre, la Providence m’a spécialement envoyé ici pour rame-