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Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, I.djvu/100

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liv. ier.
AGRICULTURE : ENGRAIS.

ment, qu’alors elles prennent une couleur rougeâtre due au peroxide de fer, et qu’elles ne contiennent presque plus rien de soluble. Les sulfates de fer et d’alumine décomposés n’ayant laissé que de l’oxide de fer et de l’alumine, en cet état elles n’offrent plus qu’un amendement sableux, analogue à l’argile calcinée propre à l’amélioration des sols trop compacts.

L’argile calcinée, mise en poudre, est en effet un excellent amendement des sols argileux, froids, ou terres trop fortes ; elle les rend plus perméables à l’eau et aux solutions nutritives ou stimulantes. Son mélange augmentant la porosité du sol, le rend capable d’absorber et de retenir beaucoup mieux les gaz utiles à la nutrition des plantes.

C’est encore par la même influence que la cendre de houille est très-utilement employée pour diviser les terres fortes humides, en Belgique, tandis que, essayée sur les terrains légers et secs, elle n’a produit que de mauvais résultats.

Nous avons vu que les cendres de bois ont, en outre, l’avantage d’introduire des bases alcalines, des sels stimulans, et une grande proportion de carbonate de chaux, si utile dans les sols privés ou peu pourvus de calcaire.

Les cendres de mer, ou résidus de la combustion des plantes marines, contiennent, en outre, une plus forte proportion de chlorure de sodium (sel marin), et de sulfate de soude et de potasse, que toutes les autres ; aussi leur action stimulante est-elle bien plus énergique.

L’action stimulante des sels, si spéciale à certaines plantes, et si bien constatée pour le sulfate de chaux (plâtre) sur toutes les légumineuses, peut être nuisible sur d’autres plantes, du moins à égales proportions. C’est ainsi qu’un terrain trop salé, par suite de l’évaporation de l’eau de mer, pour donner d’abondantes récoltes en céréales, produit un développement très-remarquable sur les Salsola, au point que, passé en grande partie dans ces plantes, le sol peut être par suite assez dessalé pour que les blés y viennent bien.

Les coquilles d’huître, les bancs coquillers dits faluns, exploités notamment en Touraine, et les varechs, ramassés sur les côtes de la Bretagne, contiennent, outre les sels stimulans et le carbonate de chaux, des substances animales qui constituent les engrais azotés. Nous y reviendrons plus loin en traitant de ces derniers.

Les nitrates de chaux, de potasse et de soude, qui forment une partie active des matériaux salpêtres, des plâtras tirés des murs de caves, des écuries, etc., sont aussi très-favorables au développement de diverses plantes ; quelques-unes en peuvent absorber d’énormes quantités : c’est ainsi que des betteraves cultivées dans un sol fumé avec des boues de Paris mêlées de plâtras salpêtres, m’ont donné, en les analysant, une quantité de nitrates presque égale à la quantité de sucre qu’elles contenaient pour un même poids. Ces racines, ayant d’ailleurs rencontré dans le sol une proportion convenable d’humidité et d’engrais, avaient acquis un très-grand développement.

La culture d’une année en betteraves offrirait donc un des bons moyens de dessaler un sol trop salpêtre.

Section ii. — Action des divers engrais.

Les différens débris de végétaux et d’animaux qui ont été doués de la vie sont destinés à servir d’alimens aux plantes ; c’est en se désorganisant de plus en plus qu’ils fournissent les produits solubles ou volatils assimilables. Ainsi, lorsque des plantes arrachées sont mises en tas, une fermentation s’établit, échauffe la masse, dégage de la vapeur d’eau et des gaz que décèle leur odeur plus ou moins forte ; des sucs altérés, n’étant plus contenus par les tissus organisés qui se déchirent peu-à-peu, s’écoulent ou se dissolvent dans les eaux pluviales : ce sont ces gaz dégagés avec la vapeur d’eau, et ces substances dissoutes, qui peuvent servir d’engrais.

Les débris des animaux morts présentent des phénomènes analogues : les produits de leur décomposition, solubles ou gazeux, développent une odeur plus forte ; ils diffèrent notamment par la présence d’une beaucoup plus abondante production d’ammoniaque et par une action plus vive et plus grande, qui doit en faire réduire la quantité relativement à d’égales superficies de terres en culture.

Enfin, les déjections animales donnent directement des produits liquides et gazeux assimilables par les plantes, et qui constituent la partie la plus active de tous les fumiers.

Ces décompositions spontanées, que favorisent l’oxigène de l’air et sa température plus élevée, exhalent notamment l’acide carbonique libre ou combiné dont les plantes peuvent extraire le carbone qui accroît leurs parties solides.

Plusieurs savans avaient dit, sans toutefois être d’accord avec tous leurs confrères, que dans la fermentation des engrais le dégagement d’une grande partie des produits volatils constituait une importante déperdition des principes utiles à la végétation. Cependant presque tous les agriculteurs avaient observé une influence défavorable plus ou moins fortement marquée de la part des fumiers non consommés, et surtout de diverses matières animales, telles que la chair, le sang, les viscères, etc. Ainsi donc la science indiquait tous les principes utiles, et la pratique semblait avoir appris combien il en fallait perdre pour assurer au résidu une incontestable efficacité.

La question en était à ce point lorsque, dans un concours ouvert par la Société centrale d’agriculture, le mémoire qui obtint le ler prix démontra que l’on pouvait appliquer sans aucune déperdition toutes les matières organiques, même les plus putrescibles, à fertiliser les terres, et doubler, tripler, quelquefois même décupler ainsi leur effet utile. Depuis je reconnus encore que dans les sols fertiles une faible réaction alcaline, due, soit à la chaux, soit au carbonate de soude ou de potasse qui se trouvent dans les cendres, etc., soit au carbonate d’ammoniaque dégagé par les matières animales, peut activer beaucoup la végétation ;