Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, I.djvu/99

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
chap. 4e.
85
CIRCONSTANCES FAVORABLES À L’ACTION DES ENGRAIS.

prouve aucune division ultérieure ; par cette cause, retenant donc à peine la sixième partie de l’eau interposée que peut renfermer le plâtre bien cuit, il offre d’autant moins de prise à l’action dissolvante.

Ces phénomènes, que chacun peut à volonté reproduire, expliquent les anomalies apparentes observées dans les effets du plâtre cuit ; anomalies qui ont porté quelques agronomes à penser que le plâtre cru agit aussi efficacement que le plâtre cuit. Cela est vrai si ce dernier a été mal divisé, soit par suite d’une trop forte calcination, soit par toute autre cause. En effet, le plâtre cru mis en poudre cède au moins autant à l’action dissolvante de l’eau, que le plâtre trop calciné.

Ainsi, la seule utilité de la cuisson du plâtre pour l’agriculture étant dans la grande et facile division qui peut en résulter, on doit comprendre combien il importe d’éviter l’excès de température qui produirait l’effet contraire.

Si la meilleure pierre à plâtre pour les constructions est celle qui, calcinée à point, nécessite le moins d’eau pour se fâcher, et peut en absorber le plus par des prises successives[1], il n’en est pas de même pour l’agriculture ; et cela se conçoit, puisque la divisibilité est la principale condition de son meilleur effet.

Il résulte évidemment de cette considération que les gypses lamelleux, fibreux ou à grains très-fins qui, calcinés à la température convenable, exigent beaucoup d’eau pour se gâcher et peuvent à peine faire une 2e prise avec un volume d’eau égal au premier, sont susceptibles de peu de solidité dans les constructions ; mais que, se gonflant beaucoup immédiatement, et très-faciles à diviser, ils offrent les propriétés convenables pour l’agriculture.

En réunissant les conditions précitées dans l’emploi des pierres gypseuses dont on pourrait disposer, on obtiendra le maximum d’effet du plâtre ; et une dose de 250 par hectare répandue chaque année, pourra quelquefois produire plus d’effet qu’une quantité double ou triple de plâtre mal divisé.

Les plâtras de démolitions peuvent souvent être d’un emploi très-avantageux : non seulement leur forme spongieuse les rend faciles à diviser, mais encore les matières organiques et les nitrates qui s’y sont peu-à-peu introduits ajoutent aux engrais et aux stimulans du sol.

On peut encore obtenir économiquement des effets analogues de certains résidus composés de sulfate de chaux, et notamment du produit de la saturation de l’acide sulfurique par le carbonate de chaux, en excès dans la fabrication du sirop de fécule.

Nous avons cru devoir entrer dans beaucoup de détails sur cet important sujet, parce que nous pouvions donner des notions précises qui, récemment démontrées, ne se trouvent dans aucun ouvrage relatif à l’agriculture publié jusqu’aujourd’hui.

On a reproché au plâtrage des luzernes d’avoir donné lieu, en quelques endroits, à la météorisation des bestiaux. Cet effet, rarement observé, nous paraît tenir à une végétation rapide sous les influences favorables réunies d’humidité, de température, d’engrais et de stimulans : dans ce cas en effet la laxité du tissu des végétaux admettant une surabondance d’eau, doit produire les effets bien constatés des nourritures trop aqueuses. Un moyen de parer à cet inconvénient consiste à mélanger un peu de sel commun aux alimens.

Plusieurs agronomes ont observé le peu d’effet du plâtre dans les sols qui déjà contiennent du sulfate de chaux en proportion notable ; il est évident que ce sel étant assez abondant pour que l’eau puisse s’en saturer, un nouvel excès qu’on ajouterait serait inutile.

Nous traiterons dans un même article de la Division des Arts agricoles, des fours à cuire le plâtre, à calciner la pierre à chaux et l’argile.

Cendres noires, terres noires de Picardie, cendres pyriteuses. — On peut encore regarder comme un puissant auxiliaire des engrais ce stimulant, dont, l’usage se répand de plus en plus.

Son efficacité nous paraît tenir à trois causes principales : 1o la couleur noire terne dont nous avons démontré l’heureuse influence comme moyen d’échauffer le sol (Voy. chap. ii, p. 46) ; 2o le sulfure de fer, dont la combustion lente augmente l’échauffement de la terre et l’excitation électrique ; 3o les sulfates acides de fer et d’alumine. L’action de ces deux sels solubles sur le carbonate de chaux que renferme le sol donne lieu à la formation du sulfate de chaux, qui agit sur les plantes comme nous venons de le dire, et au dégagement d’acide carbonique, qui offre un aliment aux parties vertes des végétaux. Ainsi donc la présence du carbonate de chaux dans le sol est ici fort utile, et on doit en remplacer la déperdition par des marnages ou des chaulages bien entendus.

Sans doute l’addition d’un engrais azoté est indispensable, après cette réaction, pour assurer la récolte des graines, tandis qu’il est moins nécessaire pour obtenir le produit des prairies, surtout dans les terres en bon état de culture.

Quant aux mêmes matières qu’on a lessivées pour en extraire les sulfates solubles dans la fabrication des magmas (sulfates d’alumine et de fer) et préparer l’alun, elles agissent de même, mais plus faiblement ; car elles retiennent toujours des mêmes sels, mais en moindres proportions.

Enfin les mêmes terres calcinées en tas, à l’aide d’une petite quantité de combustible, peuvent être tellement brûlées par suite du charbon ou du sulfate de fer qu’elles renfer-

  1. De cette propriété, et de plusieurs autres que j’ai observées, j’ai déduit cette théorie de la solidification du plâtre : les premières parties unies avec l’eau dans le gâchage se solidifiant les premières, forment une sorte de scellement qui retient celles hydratées plus tard, s’opposent à leur écartement, donnent une masse plus serrée, plus solide ; les meilleurs plâtres sont donc ceux dont les particules s’hydratent le plus lentement.