Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, I.djvu/178

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
164
liv. ier.
AGRICULTURE : FAÇONS GÉNÉRALES À DONNER AU SOL.

que la valeur de la couche arable s’augmente de 8 p. 100 avec chaque pouce de profondeur qu’on peut lui donner en sus de 6 jusqu’à 10 pouces, et qu’elle diminue proportionnément de 6 à 3 pouces. — On sait qu’à la ferme-modèle de Grignon la culture repose sur de semblables principes, et que tous les ans on a successivement labouré ou plutôt défoncé de 9 à 11 po. (0 m. 240 c.) toutes les terres destinées à former la sole des plantes sarclées.

[6:1:2:2]

§ ii. — Du nombre des labours.

Plusieurs causes fort différentes contribuent particulièrement à modifier le nombre des labours. Ce sont : leur destination, la nature et la disposition des terres qui les reçoivent, et les circonstances atmosphériques qui les précèdent, les accompagnent ou les suivent. Nous verrons, en traitant de chaque culture en particulier, quelles sont celles qui exigent, avant les semailles, plus ou moins de labours préparatoires. De pareilles spécialités, si elles n’étaient déplacées au point où nous en sommes, entraîneraient tout au moins à des redites que nous devons épargner à nos lecteurs.

Les labours de jachère doivent être assez multipliés (non seulement pour ouvrir le sol aux influences bienfaisantes de l’atmosphère) ; mais aussi pour détruire complètement les racines et les germes des plantes adventices qui l’occuperaient au détriment des cultures plus productives. — Il n’est pas sans exemple qu’on en donne jusqu’à 5 et 6 dans le courant de l’année, et, quoique de telles pratiques soient devenues assez rares à mesure que les bons assolemens se sont répandus, et qu’on soit parvenu à entretenir le sol dans un état de produit constant sans pour cela le laisser envahir par les mauvaises herbes, il faut encore reconnaître qu’une jachère d’été est parfois le meilleur moyen de nettoyer un terrain, et que, dans ce cas, les labours ne peuvent être trop nombreux.

Les terres argileuses exigent des labours d’autant plus fréquens qu’elles offrent une plus grande ténacité, et par une fâcheuse coïncidence, ces labours sont d’autant plus dispendieux qu’ils sont plus nécessaires. — Pour les rendre plus faciles, un Anglais, M. Finlayon, a imaginé de remplacer le versoir de la charrue ordinaire par 3 ou 4 baguettes en fer qui en forment, pour ainsi dire, le squelette (voyez plus loin la charrue squelette, skeleton plough). Après plusieurs essais, il a pu prononcer que les sols les plus tenaces, pris encore un peu humides, peuvent être facilement labourés au moyen de cette charrue à laquelle ils n’adhèrent que faiblement. — Un autre cultivateur du même pays, afin de diminuer le frottement du sep, a imaginé de le relever obliquement à partir du soc (voyez la charrue Wilkie), et de le remplacer, en quelque sorte, par une roue inclinée sur son axe à environ 30 degrés de la perpendiculaire et qui tourne dans l’angle du rayon formé par le contre et le soc. La charrue Wilkie ayant été essayée publiquement en 1829, il a été reconnu, dit M. Loudon, qu’elle exige une force de tirage de 30 p. 100 moindre que la meilleure charrue ordinaire. — Enfin, le major Beatson, dans le but de multiplier, aux moindres frais possibles, les labours sur les terres qui exigent impérieusement de fréquentes façons, a introduit sur ses propriétés un extirpateur à 7 dents de 10 po. fixées à 9 po. de distance les unes des autres, sur deux lignes parallèles écartées entre elles de 11 po. Cet instrument, attelé d’un seul cheval et qui ne pénètre d’abord qu’à une faible profondeur, à force de revenir sur le même sol, finit par atteindre la portée des labours ordinaires.

Les terrains légers, sablonneux et chauds exigent moins de labours que les sols argileux. Cela dérive si naturellement de tous les principes posés dans le cours de cet article, qu’il serait superflu d’entrer dans de nouveaux détails.

Remarquons encore que des façons nombreuses, sur des collines en pente tant soit peu rapides, tendent à dénuder leur sommité de terre, et par suite à les rendre improductives, à moins de frais considérables ; — que dans les localités exposées aux inondations, les terres sont d’autant plus sujettes à être entraînées par le courant, qu’elles sont labourées plus fréquemment, et que, bien souvent, sous peine de désastres inappréciables, on est contraint de ne les pas labourer du tout.

Quant aux circonstances atmosphériques, elles exercent une très-grande influence surtout relativement aux terres d’un travail naturellement difficile. — Le champ le plus compacte, labouré pendant le cours de l’automne dans un état convenable, c’est-à-dire ni trop sec ni trop humide, après qu’il a été soumis à l’action puissante des gelées d’un hiver plus froid que pluvieux, n’a pour ainsi dire besoin, s’il est exempt de mauvaises herbes, que d’être gratté à sa surface avant l’époque des semailles. Il se réduit presque de lui-même en terre meuble, tandis que de nombreux et profonds labours pourraient lui devenir mécaniquement plus nuisibles qu’utiles si la saison se comportait mal. Un M.Crowe, dit Arthur Young, donna à une pièce de terre argileuse une jachère complète de deux ans. À la St.-Michel de la seconde année, il sema cette pièce en froment après douze labours. Quel fut le résultat de cet essai ? une magnifique récolte sans doute ? Point du tout. Le blé leva fort bien, mais le printemps fut pluvieux : plus la surface était belle et bien atténuée, plus elle fut apte à se prendre comme un mortier. La récolte ne produisit que 14 bushels par acre, encore le grain fut-il de mauvaise qualité. On voit par cet exemple que le nombre des labours n’équivaut pas toujours à leur opportunité.

Assez généralement dans les terres à froment, et pour les semis de cette céréale, ou donne de 3 à 4 labours. — Arthur Young établit que ce dernier nombre est à peu près indispensable. — ROZIER veut au moins trois labours de préparation, indépendamment de ceux qui doivent précéder coup sur coup les semailles.— John Sinclair indique 4 labours de jachère avant celui des semailles. Enfin, ainsi que je l’ai déjà dit, il est des contrées où la pratique va même au-delà sans apprécier