Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, I.djvu/256

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que je connaisse, est celle usitée dans quelque parties de la Suisse, et décrite par Schwertz. La fig. 352 en donnera une idée. A est la digue qui ferme le réservoir, et derrière

Fig. 352.

laquelle l’eau peut s’élever jusqu’à la hauteur B. Arrivée à ce point, elle s’introduit dans le conduit E d’où elle coule dans la cuillère ou cuvette C. Celle-ci repose sur une goupille qui joue dans l’échancrure du poteau G ; le manche étant plus lourd que le reste, à cause de la pierre dont il est chargé, forme le contrepoids et pose sur la pièce F. i est une planche étroite, mobile dans une charnière, et destinée à fermer, au moyen d’un tampon de cuir ou de chiffons qui y est appliqué, l’orifice du conduit L, par où se vide le réservoir. La pression qu’effectue la cuvette sur la planche, fait presser le tampon contre la bouche du conduit. Mais, lorsque le réservoir étant plein, le cuvette se remplit, celle-ci s’abaisse, et le réservoir s’écoule dans le canal de conduite N. Les traits ponctués montrent les choses dans cet état.

Jusqu’ici on a très-peu de notions sur la quantité d’eau nécessaire pour arroser convenablement une étendue donnée de prairie, parce qu’il est très-difficile d’apprécier non seulement le volume, mais encore la vitesse d’un cours d’eau ; que, d’ailleurs, cette quantité dépend de la nature plus ou moins sèche du climat, plus ou moins perméable du sol. M. Boux, agriculteur à Arles, estime qu’il faut 822 mètres cubes (24 mille pieds cubes) d’eau pour arroser convenablement un hectare, ce qui fait 3 ½ pouces sur la hauteur. Un agriculteur des Landes, M. Borda, indique approchant la même quantité. Dans le centre et le nord de la France, une quantité moitié moindre serait souvent suffisante. En Lombardie l’eau se paie, selon M. Burger, au volume et au temps, au jour, à l’heure, et à l’once (oncia). Cette dernière mesure est la quantité d’eau qui passe par une ouverture d’environ 42 pouces carrés, avec une pression correspondant au poids d’une once placé au-dessus. D’après des expériences très-exactes, une once donne dans une minute 2,185 mètres cubes d’eau, et peut, en 24 heures, arroser 43 pertiche (près de 3 hectares) de prés, et 36 pertiche (2,36 hect.) de terres arables.

Lorsqu’on a peu d’eau à sa disposition, on tâche de l’employer successivement à arroser plusieurs terrains à la suite les uns des autres. Les derniers sans doute profitent moins parce que le limon fertilisant s’est déposé avant d’y arriver ; par cette raison il faut de temps à autre y faire couler l’eau directement.

Il est facile de s’assurer de la convenance d’une eau pour l’irrigation, à l’examen de ses bords ; s’ils sont garnis d’une herbe vigoureuse et de bonne qualité, on peut être certain de ses bons effets sur les prés.

En général, il n’y a d’absolument mauvaises que les eaux qui contiennent des substances minérales vénéneuses, de même que celles qui sortent de marais tourbeux et des grandes forêts et qui sont chargées de principes acides et astringens. Les eaux trop froides et celles qui charrient une trop grande quantité de sédiment argileux qu’elles déposent sur l’herbe, nuisent aussi. On obvie à ces deux inconvéniens par les réservoirs mentionnés ; l’eau y acquiert une température plus élevée et y dépose la surabondance de sédiment.

Cette surabondance de sédiment n’est du reste mauvaise que lorsque l’herbe est prête à être fauchée ; dans tous les autres cas, et surtout lorsque le sol de la prairie est gréveux et sablonneux, le limon, pourvu qu’il provienne de terres fertiles, est extrêmement avantageux, et on a même prétendu, quoique à tort, qu’il était la seule cause des admirables effets de l’irrigation. Toujours est-il qu’il y contribue beaucoup et que les meilleures eaux sont celles qui charrient le plus de terre et de sucs de fumier.

Les réservoirs mentionnés sont encore dans cette circonstance fort avantageux ; ils permettent de procurer ces qualités aux eaux qui en manquent, en même temps qu’ils dispensent de conduire les engrais liquides dans la prairie, à laquelle ils épargnent ainsi les dommages que causent les roues de la voiture et les pieds des chevaux. On conduit le purin et le lizier dans le réservoir ; on peut aussi déposer sur ses bords du fumier pourri qu’on arrose fréquemment.

Lorsqu’on n’a pas de réservoir, on fait couler les engrais liquides dans le canal principal.

Après ces eaux fertilisantes viennent celles