Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, I.djvu/401

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
chap. 15e.
387
du seigle.

est cependant susceptible de donner un pain rude et de qualité inférieure, mais nourrissant et sain, et qui s’améliore beaucoup par le mélange du seigle ou du froment. — On mange aussi l’orge à l’état de gruau ou d’orge mondé. Dans ce dernier état, sous une forme analogue à celle du riz, et associée à de la viande, elle est fréquemment utilisée dans les fermes allemandes pour la nourriture de la famille. — Le grain d’orge est diversement employé dans l’art de la distillerie. — En médecine, on le considère comme rafraîchissant ; — enfin, personne n’ignore l’usage considérable qu’on en fait, dans une grande partie de l’Europe, pour la fabrication de la bière.

Nous verrons ailleurs avec détail que cette même graminée donne un excellent fourrage vert. — Sa paille, quoiqu’il y ait beaucoup de diversité dans l’opinion des écrivains et des cultivateurs, sur la valeur nutritive qu’on doit lui attribuer, diversité qui peut être due autant au choix des variétés qu’à la nature du terrain ; sa paille, disons-nous, si on s’en rapporte aux analyses chimiques, est cependant supérieure à celles du froment et du seigle, comme fourrage sec. — L’orge en grain est fort souvent substituée, dans le Midi surtout, à l’avoine, pour la nourriture des chevaux. — Trempée, et encore mieux moulue ou simplement écrasée entre deux cylindres, et déjà en état de fermentation, elle augmente considérablement le lait des vaches, engraisse rapidement les bœufs, les cochons, les volailles, etc.

[15 : 3 : 1]

§ ier. — Espèces et variétés[1]

Dans le froment, les épillets, solitaires sur chaque dent de l’axe, sont alternés sur deux côtés opposés. Dans l’orge, ils sont ternés sur chaque dent ; les deux latéraux sont souvent mâles et pédicellés ; celui du milieu, sessile et hermaphrodite. Cependant, ce dernier caractère, très-ordinaire dans les espèces sauvages, l’est beaucoup moins pour les espèces cultivées. Il en est dont toutes les fleurs sont même constamment hermaphrodites. — Les glumes sont à deux valves, qui forment une sorte d’involucre à six feuilles ; — chaque glume renferme une seule balle a deux valves.

A. Orge carrée[2] ; — Orge commune de De Candolle (Hordeum vulgare, Lin.).

L’orge carrée a presque toujours toutes ses fleurs hermaphrodites et munies de barbes longues et droites. — Des 6 rangées de fleurs, 4 sont plus proéminentes que les autres, et donnent ainsi à l’épi une forme à peu près quadrangulaire.

1. Escourgeon, scourgeon (en Flandre) ; — Orge d’hiver ; — O.carrée d’hiver (Hordeum vulgare hybernum) (fig.552). — C’est l’orge hivernale par excellence. Elle est très-estimée et fort cultivée dans le nord de la France, où on la regarde comme la meilleure pour la bière, et la plus productive de ses congénères. Semée avant l’hiver, elle mûrit la première de tous nos autres grains. — Si on la semait au printemps, elle pourrait parfois réussir ; mais une telle pratique serait d’autant moins avantageuse dans les circonstances ordinaires, qu’elle ne monterait pas du tout si le printemps était sec.

2. Orge carrée de printemps ; — petite Orge ; Escourgeon de printemps (H. vulgare æstivum). — Cette variété, très-répandue dans le nord de l’Allemagne, est fort peu cultivée en France. Elle est cependant hâtive, passe pour s’accommoder mieux qu’aucune autre des terrains médiocres, et peut être semée avec chances de succès jusqu’à la fin de mai.

3. Orge noire (H. vulgare nigrum). — Celle-ci diffère des autres, autant par sa manière de végéter que par la couleur de son grain. Quoique bien évidemment de printemps, puisque, semée en automne, elle ne réussit pas, du moins sous le climat de Paris, si on la met en terre plus tard que la fin de mars, elle ne monte pas toujours. Dans ce cas, elle devient quelquefois bisannuelle : ses touffes se conservent vertes, passent l’hiver beaucoup mieux que si elles n’avaient commencé à se développer qu’en automne, et fructifient abondamment l’année suivante. Une telle disposition pourrait la rendre doublement avantageuse, comme fourrage la 1re année, et comme récolte à grain la 2e. Quand elle monte bien, son produit est très-considérable.

4. Orge célesteOrge carrée nue ; — petite Orge nue (H. vulgare nudum ; — H. cœleste, L.). — L’orge céleste est regardée comme une des plus productives, mais sous la condition, plus rigoureuse pour elle que pour toutes les autres, d’un bon terrain. On a pu remarquer avec Thaer qu’elle talle infiniment plus, quoique sur un même sol, et quoique les plantes soient à une même distance. — La paille est plus longue et de qualité supérieure. — Les

  1. Ce paragraphe est en grande partie extrait d’un Mémoire, encore inédit, sur les orges, par M. Vilmorin O. L. T.
  2. Quoique le nom français de cette espèce, correspondant au nom botanique latin, soit Orge commune, nous ne l’adoptons pas, parce qu’il tend à faire confusion avec l'orge plate ou à 2 rangs, qui est, pour les Français, la véritable orge commune. Le nom d’orge carrée n’est pas bon, puisque l’espèce a réellement 6 rangs rapprochés ; mais connue c’est l’un des plus en usage, nous avons mieux aimé le conserver que d’en créer un nouveau. Vilm.