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liv. ier.
AGRICULTURE : SOL.

rait le croire, proportionnée à la faculté des terres pour retenir l’eau. En effet, la chaux carbonatée fine retient une grande proportion d’eau : et cependant son retrait n’est que de 50 parties sur 1000, tandis que l’argile perd 183 parties. Cette qualité n’a pas non plus de rapport avec la consistance du sol : l’humus possède une ténacité bien moindre que l’argile ; néanmoins son retrait est beaucoup plus considérable. — 4o La pulvérisation de la marne, par les influences atmosphériques, s’explique en partie par la différence de retrait de ses composans, l’argile et la chaux carbonatée fine ; les points de contact des différentes parties sont écartés par le retrait inégal, et les blocs de marne se pulvérisent spontanément. — 5o Ce fait explique encore une partie de l’influence de la marne calcaire, bien préférable à un mélange de sable et d’argile : le carbonate de chaux diminue la consistance et la ténacité du sol, mais en outre il possède un plus grand pouvoir absorbant pour l’eau, il est capable de saturer les acides, propriétés que le sable ne peut offrir.

§ VII. — De l’effet de la capillarité des sols.

L’action capillaire, qui détermine l’ascension et les infiltrations des liquides dans les sols, est fort importante à considérer, bien que cette cause n’agisse pas seule. — On peut facilement se rendre compte de cet effet en plongeant dans l’eau un petit tube ouvert des deux bouts : on verra que le liquide s’élèvera dans le tube au-dessus de son niveau dans le vase, et la différence sera d’autant plus grande que le diamètre du tube sera plus petit, comme le montre la figure 34.

Si, comme on le voit fig. 35, on approche deux lames de verre plongées en partie dans l’eau, le liquide s’élèvera entre elles, mais moins que dans les tubes pour un écartement égal au diamètre intérieur de ceux-ci. Enfin, si au lieu de maintenir ces lames parallèles, on les joint sur une de leurs arêtes, de manière à former un angle, comme dans la fig. 36, on verra le liquide s’élever graduellement davantage en s’approchant des arêtes en contact. On voit d’ailleurs sur toutes les surfaces que l’eau peut mouiller, ce liquide s’élever sur la ligne de contact, comme le montrent encore les figures ci-dessus.

Ces phénomènes, qui dépendent et de l’attraction des surfaces précitées, et de l’attraction entre les parties du liquide, ont lieu dans les interstices des corps en grains informes, tels que le sable, et plus sensiblement encore dans les substances poreuses dont les cavités en rapport forment une suite de tubes irréguliers : tels sont les éponges, les platras, les pierres tendres, les terres plus ou moins légères ; aussi voit-on ces substances s’humecter à une hauteur plus ou moins grande lorsqu’elles sont en contact avec l’eau seulement par leur partie inférieure. Cela explique l’humidité constante au-dessus du sol dans les carrelages, murs, etc., construits en matériaux poreux, et une foule de faits qu’il serait trop long de rapporter ici.

La capillarité dans les sols est une de leurs plus importantes propriétés. En effet, c’est elle surtout qui conduit près des parties spongieuses des racines, les liquides environnans, lorsque les solutions en contact sont absorbées ; elle ramène à la superficie les liquides infiltrés, au fur et à mesure que l’évaporation entraîne l’eau dans l’atmosphère. — Ce dernier effet fait aussi revenir près de la surface du sol les substances solubles fixes qui suivent l’eau liquide, mais l’abandonnent lorsqu’elle se vaporise. — Parmi les substances solubles, plusieurs sels augmentent considérablement les effets de la capillarité, en lui fournissant de nouveaux points d’appui ; aussi les voit-on grimper à de grandes hauteurs, ou venir en efflorescence à la superficie du sol.

Ces efflorescences salines permettent de faire de véritables récoltes de sels par un simple balayage en certaines localités. C’est ainsi qu’on se procure le salpêtre de Houssage dans l’Inde.

Dans les terrains trop salés les mêmes phénomènes débarrassent en partie le sol de l’excès du sel. On pourrait augmenter cet effet utile en écroûtant ces terrains pendant les sécheresses, puis exposant à des lavages naturels par les eaux pluviales, ou par des irrigations artificielles, les terres ainsi enlevées, avant de les répandre sur les champs, ou avant de les livrer de nouveau à la culture. Les labours en sillons profonds ont d’ailleurs une efficacité plus immédiate dans la culture des terres trop salées.

La capillarité des sols dépend surtout d’une perméabilité convenable (V. page 42) ; ainsi, trop sableux ou trop argileux, ils entravent la force capillaire : dans le 1er cas, en offrant de trop larges interstices et se desséchant trop complètement ; dans le 2e cas, en rétrécissant tellement les interstices, que toute circulation de l’eau y devient impossible. C’est ce qui arrive aux argiles plastiques ; lorsque celles-ci constituent le sous-sol, la capillarité seule dans la couche arable supérieure peut ramener à la superficie, où elle s’évapore, l’eau excédante que le fonds argileux retenait, et qui eut altéré les racines des plantes.