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liv. ier.
AGRICULTURE : AMENDEMENS.

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§ iv. — Du nitrate de potasse ou salpêtre.

Son succès sur le sol, contesté par quelques-uns, a été fort grand dans de nombreuses expériences faites en Angleterre. Les essais comparatifs avec le sel marin paraissent lui avoir donné l’avantage. En Angleterre le prix du salpêtre qu’on extrait de l’Inde est assez peu considérable pour qu’il puisse encore être employé avec avantage par l’agriculture.

La dose la plus utile du salpêtre est à peu près la même que celle du sel marin ; elle varie de 3 à 5 quintaux par hectare. On l’a employé avec succès sur les diverses céréales ; cependant son effet a été plus remarquable sur les prairies naturelles et sur les trèfles.

Curling l’a mêlé avantageusement avec les cendres, ce qui lui a permis d’en diminuer la dose. M. John Lee, qui l’a employé pendant quinze ans, pense qu’il fait produire en proportion plus de paille que de grains, et que son effet se prolonge sur la 2e récolte ; mais d’autres agriculteurs ne partagent pas cette opinion. — On est peu d’accord sur la nature des terrains auxquels convient le mieux l’application du salpêtre ; son effet a été avantageux sur un grand nombre de variétés de sols, mais il semble avoir été plus satisfaisant sur les terrains calcaires.

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§ v. — Remarques générales.

M. Lecoq a encore constaté plusieurs circonstances de l’emploi des substances salines. Ainsi, il les a répandues en poussière au printemps sur les plantes en végétation. Une partie de sol semée en froment sur laquelle, au mois d’octobre, il répandit une dose de sel, a été moins productive qu’un autre lot contigu salé au mois de mars.

Le moment le plus favorable pour donner le sel aux pommes-de-terre serait celui qui précède le buttage ; il en serait sans doute de même du maïs ; dans ce cas, c’est sur ce sol, et non sur les plantes en végétation que le sel est répandu.

L’effet produit par les substances salines est instantané, mais il est peu sensible pour les sols humides et de peu de durée. Elles agissent à petites doses, toutes circonstances qui lui donnent la plus grande analogie avec le plâtre : c’est donc comme stimulant que ces substances agissent, et l’on n’a point à craindre quelles épuisent le sol, à la condition qu’on y joindra une quantité de fumier proportionnée au produit, comme on le fait pour les sols amendés par les engrais de mer.

Après tous les développemens que nous venons de donner, nous sommes bien en droit de conclure que les substances salines aident puissamment la végétation ; mais leur effet malheureusement n’est pas uniforme, n’est pas général, et ce n’est que sur certains sols qu’il se produit. Depuis le mémoire de M. Lecoq, M. de Dombasle a essayé le sel sur son sol ; mais, comme la chaux, il ne lui a pas réussi. Nous avons fait nous-mêmes, à ce sujet, des essais assez nombreux : au printemps dernier, nous avons employé les doses les plus productives des expériences de M. Lecoq avec deux variétés de sel : le sel ordinaire du commerce et le sel de morue ; cette dernière variété moins chère nous semblait devoir être plus énergique à cause des parties animales qu’elle contient. Ce sel, répandu sur quatre portions de prés de position et de sol variés, n’a produit aucun effet sensible : employé sur des portions de champs de froment, en sol de gravier, en sol argilo-siliceux et en sol calcaire, il en a été de même ; enterré à la première façon des pommes-de-terre et au buttage du maïs, il n’a donné aucun résultat ; il a seulement semblé exciter un peu plus la vigueur des vesces d’hiver. A. Puvis.

Section iv.Des amendemens par le mélange des terres.

Si les amendemens stimulans, dont il a été question dans la section précédente, s’appliquent à des sols très-divers, ce qui doit être puisqu’ils agissent plutôt en excitant les forces végétatives qu’en modifiant les propriétés physiques du terrain, nous avons vu au contraire que les amendemens calcaires, dont il a été traité dans la 2e section, ne conviennent qu’aux terres de nature sableuse ou argileuse. Il nous reste à indiquer les amendemens qu’il convient d’employer sur les sols naturellement calcaires, et à citer quelques faits isolés fournis par la pratique de diverses localités, et qui n’ont pas encore trouvé place.

Les terres où domine la chaux sont les plus ingrates et les plus difficiles à amender convenablement. L’argile paraît l’amendement le plus favorable ; l’humus, surtout lorsqu’il est d’une couleur noire ou très-foncée, donne aussi de bons résultats. Mais on ne peut dissimuler que le transport et le mélange de l’argile ne soient souvent difficiles et dispendieux. Cependant, lorsqu’elle se trouve constituer le sous-sol des terrains calcaires ou sableux, on peut la ramènera la surface avec de grands avantages. Si la charrue à deux socs, ou deux charrues à versoir marchant l’une derrière l’autre, ne peuvent l’atteindre, on remplacera la seconde charrue par celle à deux socs, ou l’on aura recours au moyen pratiqué par M. Vilmorin pour approfondir la couche arable (voir page 50, article Sous-sol).

Lorsqu’on ne se trouve pas dans cette situation favorable, il faut le plus ordinairement se borner à l’emploi des engrais, qu’on doit choisir, pour les terrains calcaires, d’une nature grasse et d’une couleur noirâtre.

M. Puvis recommande aussi le brûlement de la terre argileuse, qu’il considère à peu près comme le seul amendement pour cette nature de sol, comme le seul moyen d’y produire un effet analogue aux amendemens calcaires sur les autres terres. Il regarde donc en quelque sorte l’argile brûlée, dont il sera parlé à l’article Écobuage, comme le complément du système général des amendemens et de leur application à tous les terrains.

Notre savant collaborateur cite encore les faits suivans, dont l’application, dans des circonstances analogues, pourra être tentée par les cultivateurs intelligens.

L’argile est très-employée dans l’agriculture