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liv. iii.
ANIMAUX DOMESTIQUES : PATHOLOGIE.


secouer fortement toutes les régions du membre, afin de voir s’il n’y a pas quelque part de la chaleur, de la douleur, de la roideur, du gonflement qui puisse mettre sur la voie de la découverte ; on termine cet examen eu faisant déferrer l’animal, et parer à fond le pied du membre boiteux, et comprimant successivement tous les points de la sole et de la fourchette avec le mors ou les branches des tricoises. De cette manière, et avec quelques précautions, on parvient presque toujours à découvrir un point douloureux, et par conséquent le siège du mal. Il ne s’agit plus alors que d’appliquer un traitement convenable à la maladie reconnue. — Les boiteries dites de vieux mal sont celles qui sont anciennes, ou dont la cause est inconnue ; il y a des boiteries de vieux mal qui subsistent constamment ; d’autres ne sont apparentes que lorsque l’animal sort de l’écurie, et disparaissent lorsqu’il est échauffé pour revenir quand il a été refroidi ; d’autres enfin qui ne s’aperçoivent qu’à chaud.

§ II. — Eaux-aux-jambes.

Maladie dégoûtante qui affecte les parties inférieures des membres, et est caractérisée par un suintement d’un liquide séreux, fétide, qui humecte la partie malade, et se rassemble en gouttelettes à l’extrémité des poils réunis en paquets. Les eaux-aux-jambes attaquent plus spécialement les races communes, les chevaux qu’on élève sur des terrains marécageux, et dont les pieds sont plats, larges et évasés, et le bas des membres naturellement gros et chargé de poils abondans ; elles se montrent à toutes les époques de la vie, mais plus souvent dans l’âge adulte, et se propagent fréquemment aux quatre membres, en commençant le plus ordinairement par un seul ou par deux, et toujours par ceux de derrière. — Les causes de cette maladie sont : les excès de travail, l’influence des localités humides, des écuries malpropres, le contact des boues acres des grandes villes, la mauvaise habitude de passer à l’eau les chevaux qui rentrent du travail, et, dit-on, la contagion.

Symptômes. Les eaux-aux-jambes commencent presque toujours par une inflammation plus ou moins aiguë de la partie qui doit en être le siège. Le premier indice qui décèle celte maladie est le hérissement des poils de la couronne, du paturon et du boulet ; ce hérissement est accompagné de l’engorgement et de la roideur du membre. Bientôt commence le suintement dont j’ai parlé ; le liquide qui s’écoule est d’une odeur particulière très-désagréable, tenace et persistante ; il paraît d’abord comme une rosée qui se condense à chaque poil. Les progrès de la maladie déterminent bientôt le développement de la douleur ; celle-ci devient si forte, que le moindre contact des corps extérieurs cause une grande incommodité ; il suffit qu’une Faille touche un endroit souffrant, pour que animal lève le membre malade. Plus tard ce liquide devient épais, consistant et plus fétide, et rassemble les poils en paquets ; ceux-ci tombent et la peau se dénude dans une étendue plus ou moins grande. La matière de l’écoulement irrite les parties qu’elle touche, et entretient la douleur qui est toujours très-forte, surtout quand l’animal sort de l’écurie. Si la maladie n’est pas arrêtée dans sa marche, elle peut passer à l’étal chronique. Alors l’écoulement persiste toujours et conserve encore sa fétidité et sa consistance ; mais la douleur disparait, et l’animal ne témoigne plus la moindre sensibilité lorsqu’on lui explore le membre. C’est alors que l’on voit naître sur les parties affectées des ulcères superficiels, sur les bords desquels se développent des excroissances charnues, rouges, molles, à bases étroites, auxquelles on a donné le nom de verrues ou de grappes. Enfin l’animal maigrit et dépérit, tout en conservant son appétit qui est même augmenté, mais qui ne peut réparer complètement les déperditions qui ont lieu par les surfaces malades.

Traitement. Voici celui qui a été recommandé par M. Barthelemy ainé, ancien professeur à l’école d’Alfort : alimens sains, ration ordinaire, travail fatigant tous les jours, ne pouvant être remplacé que par cinq ou six heures au moins d’un exercice actif ; après le travail on lave la partie malade avec l’eau tiède ; on l’essuie de manière à absterger l’eau dont elle est humectée, puis on lotionne légèrement toute la surface avec une dissolution de deux onces de vert-de-gris dans un litre d’eau de rivière. On répète cette opération tous les jours jusqu’à ce qu’il n’y ait plus d’écoulement et que la partie malade soit parfaitement sèche ; il est même prudent, pour prévenir toute récidive, de continuer les lotions plusieurs jours après que la dessiccation paraît complète, ce qui a souvent lieu lorsque l’on n’a fait encore que trois ou quatre applications ; car dès la première, l’écoulement diminue sensiblement. Le travail est un auxiliaire indispensable : il détermine le dégorgement des jambes. Lorsqu’il existe des verrues, le cas est plus grave ; on commence par les couper successivement, on cautérise avec le feu la base des plus volumineuses, de celles qui saignent beaucoup, après quoi on a recours aux lotions comme dans les cas où cette complication n’existe pas. On recommande généralement l’application du feu sur le membre, comme moyen de prévenir les récidives ; cette opération n’est pas indispensable, et comme elle a l’inconvénient de tarer les animaux, on doit s’abstenir de la pratiquer, excepté peut-être dans quelques cas particuliers, où elle pourrait être rendue nécessaire par l’ancienneté du mal, l’âge avancé et le tempérament essentiellement lymphatique du sujet.

§ III. — Crevasses (mules traversines).

Entamures étroites, allongées, plus ou moins profondes, accompagnées de suintement d’une humeur fétide, et ayant leur siège au boulet et au paturon du cheval, dans le sens transversal. Les chevaux y sont exposés quand ils travaillent sur des terrains rocailleux, quand ils marchent dans les boues acres, ou lorsqu’ils demeurent au milieu des urines, sur des fumiers épais, surtout dans les écuries qu’on nettoie rarement. Les animaux dont les jambes sont grasses, chargées de poils, dont le tempérament est mou et lymphatique, paraissent plus exposés aux crevasses que les che-