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liv. iv.
ARTS AGRICOLES : LAITERIE.


che de l’industrie agricole, et à leur donner plus de précision. — En Angleterre, on a reconnu que 725 lit. de lait produisent dans un veau une augmentation de poids de 50 kil. Cette augmentation a lieu en 7 semaines, époque à laquelle on le livre ordinairement au boucher, et sa consommation en lait a lieu dans le rapport suivant : 1re  semaine, 45 lit.; 2e, 72 ; 3e, 90 ; 4e, 110 ; 5e, 125 ; 6e, 137 ; 7e, 146 : total, 725. On considère également, dans le même pays, que l’étendue en prairies ou en herbages ordinaires nécessaire pour ajouter 50 kil. en viande au poids d’un bœuf, employée à nourrir une vache, fournirait 1500 lit. environ de lait, qui, convertis en fromage, en donneraient 95 kil., indépendamment de la quantité de chair qu’on obtiendrait en nourrissant les cochons avec le petit-lait. — Le nombre des porcs qu’on peut engraisser avec les résidus d’une laiterie dépend de la nature de ces résidus, et suivant que c’est du lait écrêmé aigri, du lait de beurre ou du petit-lait. On a trouvé par expérience, en Angleterre, que 2 vaches suffisent pour entretenir un porc de 2 ans de lait aigre écrêmé, jusqu’à ce qu’il soit mis à l’engrais, et qu’il en faut 4, dans la saison favorable, pour porter un porc de 20 kil. à 120 kil., ce qui fait 25 kil. par vache, qui allaite en outre son veau. Quand on ne donne aux porcs que le lait de beurre ou le petit-lait, on leur en administre 10 à 12 lit. par jour. En Auvergne, on entretient avec le petit-lait un nombre de porcs égal au tiers de celui des vaches (Grognier), et dans les fruitières suisses, 12 porcs pour 100 vaches (C. Lullin), etc. D’après les résultats d’essais nombreux, on peut admettre en principe que le poids du foin et de la paille consommés en nourriture, et celui d’une litière qui, en absorbant toute l’urine, n’excède cependant pas les besoins, sont doublés dans leur transformation en fumier. (Thaer.)

§ II. — Profits de la laiterie.

Avant de donner des exemples de la manière dont doivent être calculés les dépenses et les profits d’une laiterie, nous rappellerons ici en peu de mots quelques principes généraux qui servent à les assurer ou à les étendre, ou à faire mieux apprécier ceux qu’on est en droit d’attendre d’une bonne administration.

Pour retirer des bénéfices d’une laiterie, on aura donc égard aux conditions suivantes :

1o La localité. Nous avons déjà dit (p. 1re ) que c’était elle qui servait à déterminer sous quelle forme il était le plus avantageux de débiter les produits de la laiterie. Mais cela ne suffit pas encore, et il faut de plus que, dans cette localité, il y ait pour ces produits un marché toujours ouvert, placé à une distance modérée, d’un accès facile, où l’on trouve en tout temps un écoulement prompt des denrées de ce genre, à un prix satisfaisant et qui ne subisse pas des variations trop étendues dans le cours de l’année.

2o Des animaux de choix. C’est une condition fort importante ; et un fermier soigneux doit bannir impitoyablement de ses étables toute vache qui n’est pas bonne laitière, qui consomme au-delà de ce qu’elle rapporte ou ne paie pas sa nourriture. Il en fera de même pour celles qui donnent des produits de mauvaise qualité ou peu riches en principes.

3o La perfection des produits. En général on doit s’efforcer de fabriquer des produits excellens, parce que, sans coûter beaucoup plus de travail, ils peuvent se débiter à un prix bien plus élevé, et que leur réputation peut les faire rechercher au loin, c’est-à-dire dans un marché beaucoup plus étendu. Néanmoins il faut souvent consulter à cet égard le goût et les caprices des pays environnans où s’écoulent ces denrées ; mais il est toutefois certain qu’une bonne fabrication étend toujours la consommation.

4o Le bon marché de la nourriture. Il faut s’efforcer, par tous les moyens, de diminuer le prix de la nourriture, qui ne doit pas toutefois cesser d’être saine et abondante. C’est ainsi qu’on doit rechercher avec empressement les résidus des féculeries, des fabriques de sucres de betteraves, des distilleries, etc., dont le bas prix procure une nourriture économique aux animaux et favorable à la production du lait.

5o La condition de l’éducateur. Le fermier doit être propriétaire ou au moins locataire des pâturages ou terres qui servent à la pâture des vaches ou à la production des denrées qu’elles consomment ; et il doit s’acheter à lui-même l’herbe, le foin, ou autres denrées consommés par ses animaux, au prix de la ferme ou de revient, et non pas au prix du marché, comme on le fait généralement par erreur quand on établit le compte des frais et recettes de la laiterie. — Ceci demande une explication. Un cultivateur ne retire généralement de bénéfice des produits de son exploitation que lorsque ceux-ci, portés sur le marché, passent dans d’autres mains. Or, le foin consommé chez lui ne doit pas, quand il se l’achète à lui-même, lui procurer ce bénéfice ; et s’il vend son foin au prix du marché, puis qu’il vende ensuite son lait avec avantage, il aurait eu un double bénéfice de ses avances, ce qui est difficile, ou au moins ce qui arrive rarement. Il faut donc qu’il choisisse entre le bénéfice qu’il peut faire sur le foin ou celui que lui procurera le lait, après que le foin aura été vendu au prix de la ferme ou de revient et converti en lait ; en un mot il ne doit réaliser des profits qu’après que les produits de sa ferme, soumis par lui à diverses transformations, auront été apportés sur le marché, et passeront dans d’autres mains qui le rembourseront avec avantage de toutes ses avances. Cette observation mérite attention, parce que, faute d’y avoir eu égard, plusieurs agronomes ont à tort constitué en perte le compte de la laiterie dans les établissemens ruraux dirigés, du reste, avec sagacité.

6o Consommation sur lieu. Il y a presque toujours beaucoup d’avantage à faire consommer dans la ferme, surtout par la famille et les serviteurs, la plus grande quantité possible de laitage, qui remplacera avec avantage d’autres objets de consommation d’une valeur plus grande, ou qu’on ne peut se procurer qu’à un prix plus élevé et argent comptant.