Aller au contenu

Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1845, V.djvu/142

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
130
livre viii.
HORTICULTURE.


les jets de chaque année ; le fruit serait petit et de mauvaise qualité ; pour l’obtenir dans toute sa perfection, il ne faut laisser à chaque souche qu’une quantité modérée de pousses annuelles ; les jets doivent être éclaircis de manière à n’en laisser que quatre ou cinq au plus sur les plus fortes souches et deux ou trois sur les autres.

§ III. — Framboisier des Alpes.

Cette variété peu cultivée porte le nom de framboisier des quatre saisons, bien qu’elle ne produise que deux fois l’année ; elle n’est cependant pas remontante dans le vrai sens du mot ; seulement les jets de l’année, qui dans le framboisier commun ne fleurissent que l’année suivante, devancent dans cette espèce l’époque habituelle de la floraison du framboisier ; les yeux du sommet s’ouvrent en brindilles et portent fruit avant l’hiver qui les surprend toujours chargés de fleurs. On les raccourcit à la longueur ci-dessus indiquée dès que leur végétation paraît suspendue ; ils portent une seconde récolte au printemps et meurent aussitôt après avoir donné leur fruit plus petit, mais plus parfumé que la grosse framboise rouge et jaune des jardins.

§ IV. — Arbres fruitiers qu’on ne taille pas.

Nous avons à dessein rejeté à la fin de ce chapitre les arbres à fruit, soit à noyaux, soit à pépins qu’on ne taille point et qu’il suffit d’abandonner à leur végétation naturelle en les débarrassant du bois mort ; ce sont l’amandier, le cognassier, le néflier et le noisetier.

L’amandier végète absolument comme le pêcher ; lorsqu’on l’élève en espalier pour en obtenir des fruits précoces destinés à être mangés verts, on le conduit exactement d’après les principes que nous avons indiqués pour le pêcher. Ces deux arbres sont d’ailleurs tellement identiques au fond, qu’il n’est pas rare de voir les fruits de l’amandier-princesse raccourcir leur noyau, arrondir leur pulpe, et présenter tous les caractères d’une véritable pêche. L’amandier en plein-vent ne se taille point ; on se borne à lui enlever le bois mort.

Le cognassier ne peut être taillé, par la raison qu’il fleurit exclusivement par l’extrémité des branches dont l’œil terminal se façonne en œil à fruit accompagné d’un sous-œil à bois ; il forme sa tête de lui-même et a rarement besoin d’être éclairci.

Le néflier fleurit comme le cognassier et ne se taille point, pour la même raison.

Le noisetier n’a besoin que d’être débarrassé tous les ans des drageons dont les souches s’entourent chaque année pendant tout le cours de leur existence. L’enlèvement des drageons suffit pour forcer la sève à se porter sur la tige principale qui forme naturellement sa tête sans avoir besoin d’être taillée ; livré à lui-même, le noisetier croîtrait en buisson, comme le coudrier dans les bois, mais il serait moins fertile.


CHAPITRE V. — Jardin fruitier.

Nous avons considéré les arbres à fruit depuis leur naissance jusqu’à leur déclin ; nous avons passé en revue les soins qu’ils réclament aux diverses phases de leur existence, en y comprenant les moyens de renouveler ceux qui sont susceptibles d’être rajeunis. Dans tout ce qui précède, nous avons dû ne voir que des arbres isolés, envisagés sous tous leurs aspects en rapport avec l’horticulture. Il nous reste à les introduire dans les jardins : c’est le sujet de ce chapitre.

Les arbres fruitiers, dans la plupart des jardins, sont rarement l’objet d’une culture spéciale ; on ne leur consacre point un local séparé ; les plates-bandes du potager sont garnies d’arbres fruitiers conduits en pyramides, quelquefois en éventail ; les murs à bonne exposition sont couverts d’arbres en espalier. Ajoutez-y un carré de pommiers-paradis, c’est tout ce qu’on accorde aux arbres fruitiers. Pour nous, dans le double but de ne rien omettre dans cette partie de l’horticulture, et d’éviter tout ce qui pourrait détourner vers d’autres objets l’attention du lecteur, nous entendrons toujours par jardin fruitier un local exclusivement destiné aux arbres à fruit, et où, par conséquent, tout est subordonné à leur culture.

Nous aurons d’abord à nous occuper des vergers proprement dits, comprenant sous ce nom les jardins, trop rares en France, où les arbres à fruit à couteau sont conduits en plein-vent, à haute tige, sur un sol ordinairement gazonné ; ils peuvent être protégés par une simple haie vive ; les murs ne leur serviraient que de clôture ; l’ombre projetée par les têtes des arbres rendrait les murailles inutiles comme espalier. (Pour les vergers agrestes plantés d’arbres fruitiers à cidre, voir tome II, p. 145).

Les jardins fruitiers proprement dits, moins étendus quoique pouvant être aussi productifs que les vergers, sont peuplés d’arbres conduits en pyramide, en vase et en éventail ; les murs dont ils sont enclos peuvent recevoir des espaliers.

Les jardins à la Montreuil, coupés de distance en distance par des murs garnis d’espaliers, appelleront ensuite notre attention. Ils auront à nous montrer tout ce que l’industrie horticole peut obtenir de produits par la culture la mieux raisonnée, appliquée aux arbres à fruit en espalier. Nous traiterons séparément de la culture forcée des arbres à fruit, soit dans les serres, soit sous des vitrages mobiles.


Section 1re. — Verger.

§ 1er. — Choix et préparation du sol.
A. — Choix du sol.

Toute bonne terre à blé peut produire de bons fruits ; ce dicton populaire est d’une vérité incontestable. Le meilleur sol pour les ar-