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chap. 13e.
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DES CHEMINS CANTONNAUX ET COMMUNAUX.


fer fixés solidement sur les faces de ces brancards ; une forte traverse les réunit en avant du cylindre. On prolonge ces brancards en arrière de l’essieu pour leur faire porter des contrepoids, mais on ne leur fait pas dépasser le cylindre, et on ne met pas de traverse par-derrière, afin de pouvoir faire tourner le brancard à volonté sur l’essieu, de l’avant à l’arrière.

Fig. 486.

Cette manœuvre est nécessaire pour les retours, parce que pour bien tasser, il faut répéter les roulemens plusieurs fois de suite ; et, comme le frottement du cylindre sur le sol est considérable, il est difficile de le faire tourner sur place ; il vaut mieux, au bout de chaque course, dételer les chevaux et faire tourner le brancard sur l’essieu pour atteler de nouveau du côté opposé. Si, cependant, on aime mieux faire tourner le cylindre, on le peut facilement ; mais, pour éviter de gâter le chemin par le frottement, de forcer les brancards et de fatiguer les chevaux, il faut se servir d’un petit madrier de deux pieds de long sur un de largeur, un peu bombé dans son milieu. On le place en avant du cylindre que l’on fait monter dessus, et alors on le fait tourner facilement comme sur un pivot[1].

Pour que le cylindre de compression produise tout son effet, il faut l’employer lorsque le terrain est pénétré d’humidité et que sa surface commence à sécher, c’est-à-dire qu’il faut rouler quelques jours après la cessation d’une pluie de quelque durée. Alors on obtient, en roulant cinq à six fois chaque portion de route, un terrain très-uni et très-résistant, sur lequel l’eau glisse, et qu’elle ne peut pénétrer que difficilement et après de longues pluies.

Quand on ne peut pas établir immédiatement une chaussée, il faut, avant de rouler, couvrir le sol d’une couche d’un pouce environ de sable, de gravier ou autres substances analogues ; la pression du cylindre faisant pénétrer ces matières dans un sol humide, augmente beaucoup sa fermeté et son imperméabilité.

Quand on n’a pas de sable ni de gravier, on peut encore employer utilement en recouvrement une espèce de terre que l’on peut désigner sous le nom de terre dure. C’est celle qui est composée de sable ou de gravier, mêlé naturellement et intimement avec une petite quantité d’argile ; cette espèce de terre compacte acquiert, surtout quand elle est tassée, une grande dureté, et forme des chemins qui, sauf pendant les temps de longues pluies et de dégels, sont presque aussi résistans que ceux qui ont des chaussées, et sont bien plus économiques. En effet, les terres dures coûtent bien moins que la pierre ; elles ne s’usent presque pas, et il suffit, pour les raffermir, de les régaler et de les rouler après les pluies. Les terres propres à cet usage se reconnaissent ordinairement par leur résistance à l’action de la pioche quand elles sont sèches, et par la facilité avec laquelle elles se maintiennent verticalement sans talus et sans éboulemens.

Un chemin vicinal exécuté simplement en terre, avec les soins et les précautions qu’on vient d’indiquer, c’est-à-dire recouvert, lorsqu’il est humide, d’une couche de sable, de gravier ou de terre dure, et fortement comprimé, est bien résistant et presque aussi bon qu’une chaussée en cailloutis, tant qu’on ne le laisse pas pénétrer par les eaux, et qu’on n’y laisse pas former d’ornières profondes, ce qui est facile. Pour l’entretenir et le réparer, il faut éviter d’entamer sa surface à la pioche, car alors on l’ameublit et on la rend plus perméable ; il vaut beaucoup mieux employer, pour réparer et pour entretenir ces chemins, le même moyen que l’on a employé pour l’établir, c’est-à-dire le cylindre de compression.

Lorsque les ornières ne font que commencer à se former, en roulant quatre ou cinq fois le chemin après des pluies, on efface ces traces et on raffermit complètement le sol. Cette opération étant facile et très-peu dispendieuse, on peut la répéter assez fréquemment, et par là maintenir un chemin en terre constamment en bon état.

III. De l’écoulement des eaux. — En donnant un léger bombement aux chemins, on empêche les eaux d’y séjourner, et on les rejette à droite et à gauche ; mais cela ne suffit pas, car si elles s’arrêtaient sur les côtés, elles pénétreraient latéralement et amolliraient bientôt le sol ; il importe donc de s’en débarrasser complètement. Telle est la destination ordinaire des fossés, qui servent à assainir les routes et à recueillir ou à écouler les eaux pluviales. Mais les fossés, tels que ceux qui bordent ordinairement les grandes routes, conviennent peu aux chemins vicinaux ; ceux qui forment réservoir pour les eaux ne valent rien, surtout pour les chemins étroits ; car, comme nous venons de le dire, les eaux qui séjournent sur

  1. On trouve des dessins de cylindres de compression en bois et en fonte, et des explications plus détaillées sur leur construction et leur service, dans un Mémoire de M. Polonceau sur l’amélioration des chaussées en cailloutis et des accottemens des routes, publié récemment chez Carillian-Gœury, quai des Augustins, 41.