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liv. 1er.
AGRICULTURE : DES PLANTES CULTIVÉES EN GRAND.


substance soit fréquemment employée en Flandre. Dans les terres un peu compactes, on se trouve bien de l’usage du fumier pailleux. Je pourrais même ici invoquer des expériences qui prouvent que, dans les sols de cette nature, de la paille seule et des chaumes enfouis au dernier labour ont donné des récoltes extraordinaires. Mais, en général, on doit être circonspect dans l’emploi de ces fumures exceptionnelles qui conviennent peu à d’autres récoltes. Somme toute, le fumier décomposé sera appliqué aux terres chaudes et légères ; le fumier long sera réservé pour les sols argileux et froids.

Pour donner une idée de l’influence que la nature et la quotité de la fumure exercent sur le produit de la pomme-de-terre, je crois utile de citer les essais qui ont été entrepris sur cette matière et publiés par les meilleurs agronomes du continent et de l’Angleterre. La disposition par tableaux me dispensera de toute observation de détail, en même temps qu’elle fera ressortir les résultats avec plus d’évidence.

Tableau des quantités en prix comparés de divers engrais employés pour la fumure des pommes-de-terre pour un égal produit, environ 300 hectol. de tubercules.
Numéro. Nature de l’engrais. Quantité
par hectare.
Volume
par hectolitre.
Poids en kilos. Prix.
1
Noir animalisé 
1 mèt. 1/2. 15 1,500 à 5 f. » 75 fr.
2
Résidus des raffineries 
2 mèt. cubes. 20 2,000 à 5 » 100
3 Chair musculaire en poudre. 6 sacs. 8 600 à 17 » 102
4
Sang sec en poudre 
6 1/2. 8 2/3 650 à 17 » 110 50 c.
5
Râpures d’os 
15 sacs. 20 1,200 à 15 » 180
6
Chiffons, laine et soie 
20 balles. 30 2.000 à 8 » 160
7
Fumier de cheval 
45 voies. 900 54,000 à 0 , 41 216

D’autres expériences faites en Allemagne sur un sol léger, mais un peu humide, ont donné des produits qui font clairement apercevoir les avantages des diverses fumures.

Si l’on appelle 100 le produit d’un hectare non fumé, ce produit se portera à :

119, si l’on fume avec du fumier frais de cheval, à raison de 75 mille kil. par hectare ;

162, si l’on fume avec du fumier décomposé de cheval, à raison de 75 mille kil. par hectare ;

190, si l’on fume avec du fumier frais de bœuf, à raison de 75 mille kil. par hectare ;

185, si l’on fume avec du fumier décomposé de bœuf, à raison de 75 mille kil, par hectare ;

148, si l’on fume avec du compost (2/3 fumier, 1/3 gazon), à raison de 75 mille kil. par hect. ;

225, si l’on fume avec de l’urine ou du purin, à raison de 75 mille kil. par hect. ;

123, si l’on fume avec du plâtre, à raison de 75 mille kil. par hect. ;

Une chose à remarquer dans ces calculs, c’est l’effet prodigieux du purin, qui fait plus que doubler le produit de la récolte.

Quant à l’application même de la fumure, il n’y a pas de règle constante. Les uns conduisent les engrais à l’hiver, d’autres pendant l’automne, enfin le plus grand nombre fument immédiatement avant la plantation. La question ne doit pas être résolue seulement par les usages locaux ; elle est plutôt subordonnée à la nature de l’engrais et à la composition du sol. Dans un sol sec et très-léger, on se trouvera bien de conduire et de répandre le fumier pendant l’hiver. La couche d’engrais empêche les vents desséchans du printemps de hâter l’évaporation de l’humidité, que ces terres retiennent faiblement, et qui est pourtant si nécessaire au succès de la plantation.

Quand le sol est argileux, on agira d’une manière plus rationnelle si, pendant l’hiver, on enfouit le fumier. La terre se trouve ainsi allégée, ameublie, et les façons ultérieures s’exécutent avec plus de perfection. Lorsque l’on enterre le fumier, il ne faut pas le faire à une trop grande profondeur, afin que les plantes immédiatement en contact avec les détritus organiques s’en assimilent facilement une grande partie.

L’enfouissement du fumier en même temps qu’on plante les tubercules, est le plus communément en usage. Cette méthode est excellente lorsque les produits sont destinés à la consommation des animaux ou à la distillation ; mais lorsque les pommes-de-terre doivent être livrées à la consommation de l’homme, elles contractent par ce moyen une saveur désagréable. Le fumier se place de trois manières. On en met dans chaque raie ouverte par la charrue, ou bien seulement dans le sillon qui reçoit les tubercules. Quelquefois même on n’étend le fumier que sur la surface même où l’on déposera la pomme-de-terre de semence. Ces deux dernières méthodes sont préférables toutes les fois que, dans une rotation, la pomme-de-terre est regardée comme produit principal, et dans les circonstances où l’on éprouve une pénurie d’engrais. La première mérite la préférence lorsqu’on regarde la pomme-de-terre comme récolte préparatoire des céréales, et lorsqu’on dispose d’une grande masse de fumier. Lorsqu’on enterre le fumier en même temps qu’on plante, on ne doit pas perdre de vue deux considérations qu’on est trop disposé à négliger. Dans les sols humides, les tubercules de pommes-de-terre seront placés sur le fumier même, afin que celui-ci attire l’humidité contenue dans la couche qui couvre les racines, et en rende ainsi la surface plus sèche et plus facile à travailler. Dans les sols légers, au contraire, qui souffrent par excès de sécheresse, on place les tubercules d’abord et le fumier