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chap. 3e
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DE LA PATATE.


appréciées. 4° La P. blanche est fort longue et fort grosse ; on l’estime beaucoup en Espagne. 5° La P. à feuilles palmées est également blanche, grosse et longue ; elle est estimée de tous ceux qui la connaissent. Quant à la précocité, la Patate rouge l’emporte sur toutes les autres, mais elle se conserve plus difficilement pendant l’hiver. Nous indiquerons tout-à-l’heure les moyens de conservation. Passons à la culture.

Fig 32.

La Société d’horticulture de Paris s’étant fait faire un Rapport sur la culture de la patate dans les jardins, nous conseillons aux personnes qui seraient encore peu au courant de l’histoire de cette plante, de lire ce rapport [1] avant d’entreprendre la culture de la patate ; elles y trouveront des principes préliminaires propres à les guider dans la bonne roule, et à leur faire éviter les erreurs dans lesquelles on tombe souvent lorsqu’on n’est pas dirigé par l’expérience. Ici nous nous bornons à exposer ce qui nous semble indispensable à la culture de la patate en plein champ, à sa conservation après la récolte, et à l’indication de ses principaux usages.

En annonçant la culture de la patate en plein champ, nous ne voulons pas dire qu’on paisse la cultiver partout indistinctement ; celle plante a besoin pendant sa végétation d’une somme de chaleur qu’elle ne trouverait pas sur les montagnes, ni dans les plaines élevées et découvertes, ni dans les terres fortes et froides ; elle ne trouverait même pas cette somme de chaleur sous le parallèle de Paris, aux expositions les mieux abritées, sans les secours de l’art du jardinage ; mais nous croyons celle culture possible et lucrative dans nos départemens méridionaux , entre les 43e et 45e degrés de latitude, aux expositions abritées du vent du nord en terre légère qui s’échauffe aisément, fertile par elle-même ou par un engrais consommé qui y aura été préalablement mêlé, et rendue très-meuble par deux labours à la charrue, car il n’y aurait pas de succès à espérer si la terre conservait de grosses mottes.

Quoiqu’on cite M. Escudien, près de Toulon, comme plantant ses tubercules à la manière des pommes-de-terre, sans les avoir fait germer auparavant, nous ne pouvons conseiller d’employer ce procédé ; nous insistons au contraire pour que l’on fasse germer les tubercules dans un endroit particulier, afin de leur faire pousser des tiges que l’on détachera au fur et à mesure pour les bouturer, leur faire prendre racines et les planter ensuite à demeure. Voici donc le procédé que nous conseillons de suivre pour la culture de la patate, en grand, dans le midi de la France.

D’abord, il convient de se borner à une seule variété, et nous pensons qu’il faut donner la préférence à la jaune ; on pourra par la suite essayer les autres variétés. Il faut que les plantes soient plantées en lignes espacées de 4 pieds, et les plantes à 2 pieds 1/2 l’une de l’autre dans chaque ligne. 12 moyens tubercules de la récolte précédente peuvent donner au moins 400 boutures, en les faisant germer de la manière que nous allons indiquer ; ainsi rien de plus facile que de connaître le nombre de tubercules qu’il faut mettre en germination pour obtenir la quantité de plants voulue.

Dans les premiers jours de mars, on fera une couche de fumier de cheval neuf susceptible de bien s’échauffer, on la chargera de terre légère de l’épaisseur de 6 pouces, et on la couvrira d’un châssis vitré afin que la chaleur se communique promptement à la terre, et qu’elle ne se dessèche pas. Quand la terre sera chaude, on couchera dessus les tubercules à plat, en les espaçant seulement à 2 ou 3 pouces les uns des autres, on ne les recouvrira que de 2 lignes de terre, el on replacera tout de suite le châssis vitré par-dessus. En peu de jours les tubercules produiront des tiges de divers points de leur surface, qui s’élèveront perpendiculairement et seront bientôt hautes de 4 à 6 pouces. C’est alors qu’il faut voir si ces tiges sont assez nombreuses pour emplir le terrain qui doit les recevoir, car s’il n’y en avait pas assez, on en ferait pousser d’autres en cassant ou coupant les premières à 3 ou 4 lignes au-dessus de leur naissance, au lieu de les détacher entièrement pour les bouturer comme nous allons le dire.

Quand on voit que les tiges s’alongent, on prépare par un labour à la bêche une planche de terre, en la rendant aussi meuble et aussi fertile que possible par une grande division et par le mélange d’un terreau consommé ; on en unit la surface avec un râteau, et tout de suite on détache des tubercules les tiges qui ont de 4 à 6 pouces de longueur, et on les plante à 5 pouces les unes des autres dans la planche préparée. Il vaut mieux planter les boutures couchées à 45 degrés que perpendiculairement, et il faut supprimer les feuilles infirmes, s’il y en a, et faire en sorte qu’il y ait au moins trois nœuds d’enterrés. Pour peu que la terre soit humide elle ciel couvert, on doit se dispenser d’arroser, car ces boutures craignent l’humidité. Aucune bouture ne s’enracine aussi

  1. Broch. in-8. Paris, 1835 ; à la lib. de Mme Huzard, rue de l’Eperon, n. 7.