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Page:Maistre Xavier de - Oeuvres completes, 1880.djvu/79

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part et d’autre, il ne faudrait pas se presser de conclure du mérite de l’art au mérite de l’artiste. — On voit des enfants toucher du clavecin en grands maîtres ; on n’a jamais vu un bon peintre de douze ans. La peinture, outre le goût et le sentiment, exige une tête pensante, dont les musiciens peuvent se passer. On voit tous les jours des hommes sans tête et sans cœur tirer d’un violon, d’une harpe, des sons ravissants.

On peut élever la bête humaine à toucher du clavecin ; et, lorsqu’elle est élevée par un bon maître, l’âme peut voyager tout à son aise, tandis que les doigts vont machinalement tirer des sons dont elle ne se mêle nullement. — On ne saurait, au contraire, peindre la chose du monde la plus simple sans que l’âme y emploie toutes ses facultés.

Si, cependant, quelqu’un s’avisait de distinguer entre la musique de composition et celle d’exécution, j’avoue qu’il m’embarrasserait un peu. Hélas ! si tous les faiseurs de dissertations étaient de bonne foi, c’est ainsi qu’elles finiraient toutes. — En commençant l’examen d’une question, on prend ordinairement le ton dogmatique, parce qu’on est décidé en secret, comme je l’étais réellement pour la peinture, malgré