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L’ARBRE DE SCIENCE

Gay-Lussac devait lire, ni celui du Plateau Central. « Immense tendresse ? » Ils n’avaient pas besoin de savoir. Mais parce que ses mains à lui avaient besoin de l’écrire et ses yeux de le lire, il l’écrivit tout de même sur le papier de la poste, puis le déchira en petits morceaux. Il prit une autre feuille et mit simplement « tendresses ». Puis il sortit. L’après-midi finissait déjà. Juste une petite nuance de soir dans le grand ciel d’or blanc. Un quart d’heure de prière aux Religieuses Réparatrices, à cinq minutes de l’École, coupa son chemin.

. . . . . . . . . . . . .

La cordialité du jeune aumônier s’épanouit sur sa figure maladive. En entrant chez lui, Augustin venait d’y rencontrer Zeller.

— Ah ! je suis content de vous voir, dit-il. Vous tombez bien…

Laissant échapper des confidences qui vraisemblablement n’étaient destinées qu’à lui-même :

— Persuadez-le, fit-il en montrant Zeller.

Celui-ci se taisait, gêné, sans que l’aumônier vît cette gêne. Puis le pli de sa lèvre se détendit et il accepta en souriant l’intrusion.

— Voyez-vous ça, disait l’abbé. Il ne veut pas entrer à l’École Normale l’an prochain.

Augustin était muet de stupeur, et Paulin Zeller de résignation.

L’aumônier, grand enfant, continuait, entendant un peu tard ce double silence :

— Je puis le dire, n’est-ce pas ?

— Reste, Méridier, je te prie, fit Zeller, comme Augustin s’excusait et faisait mine de s’en aller. Je te demanderai seulement de t’en taire.

— Oui, fit l’abbé, votre ami veut entrer au grand Séminaire tout de suite !… enfin, à la rentrée d’octobre ! Je l’en dissuade. Dieu a besoin d’agrégés. Dieu a besoin de haute culture. Je lui demande en grâce d’attendre trois ans. Ne m’en croyez pas si vous voulez, mon enfant. Allez à Saint-