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Page:Malato - La Grande Grève.djvu/167

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nous pourrons nous mouvoir non plus seulement sur le terrain politique, mais sur tous les terrains.

Des Gourdes regardait sa femme avec admiration. La baronne continua :

— Bref, si nous savons vouloir, Paryn se ruinera, s’endettera dans la possession du journal. Il rêve maintenant la députation ; précipitez-le dans la faillite et vous en serez débarrassé à tout jamais.

Tout cela avait été dit du ton décidé d’un général en chef exposant son plan de bataille à ses lieutenants.

Le baron des Gourdes prit la main de sa femme et la porta galamment à ses lèvres.

— Vous êtes adorable, lui dit-il.

Un mois plus tard, par un vote unanime des actionnaires, la direction de l’Union populaire passait aux mains du docteur Paryn.

Ce fut un événement sensationnel dans le département et plus d’un politicien en chambre prophétisa que l’hostilité, jusqu’alors intermittente entre la Gazette de Seine-et-Loir, feuille à la dévotion de des Gourdes, et l’Union populaire allait se transformer en une lutte à mort.

Peu de temps après, eurent lieu les élections pour le conseil général. Des Gourdes fut élu à Mersey presque à l’unanimité. À peine une centaine d’électeurs, sur plus de trois mille, osèrent-ils se prononcer contre lui. Et encore ceux-là n’étaient-ils pas des mineurs.

Quant au troupeau ouvrier du baron, il s’abstint en très grande partie d’aller voter. On savait qu’à l’entrée de la salle de vote, derrière les distributeurs se tenaient les agents de Moschin, notant ceux qui déposeraient dans l’urne un bulletin au nom de Pougin, le candidat républicain modéré, l’unique concurrent qui eût osé se présenter, d’ailleurs sans nulle chance, contre des Gourdes.