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Page:Malato - La Grande Grève.djvu/168

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Et la fortune politique de Pougin n’intéressait pas suffisamment ces déshérités pour qu’ils risquassent en sa faveur leur pain quotidien. Des Gourdes, Pougin ou un autre, que leur importait ? Qu’y aurait-il de changé dans leur situation d’esclaves !


XI

UNE LETTRE DE NOUMÉA


Toute la journée Panuel s’était montré nerveux. Déjà la veille et l’avant-veille, Geneviève avait remarqué son humeur inquiète ; le brave homme allant, venant sans but fixe et demeurant silencieux pendant des heures.

La jeune femme, toujours très discrète malgré l’intimité de cette vie côte à côte qui maintenant durait depuis des années, n’avait pas voulu l’interroger. Elle attendait que son ami lui apprît, s’il le jugeait à propos, la cause de son agitation.

Mais Panuel demeurait taciturne. La présence même de Berthe, revenant de l’école de Gênac, put à peine amener un sourire sur ses lèvres tandis qu’il embrassait l’enfant, presque machinalement, sans la regarder.

À la fin, Geneviève se hasarda :

— Mon bon ami, lui demanda-t-elle, je vous vois inquiet, troublé. Avez-vous quelque chagrin ?

— Non, fit brusquement le menuisier, ce n’est rien. N’y faites pas attention.

Geneviève n’insista point. Elle remarqua cependant que, quelques minutes avant cinq heures, moment où passait chaque jour le facteur, l’agitation de Panuel redoubla et que, tout à coup, il quitta l’Étoile solitaire comme pour aller au-devant du courrier.

Son manège eût pu passer pour celui d’un amoureux attendant impatiemment quelque missive de sa