Page:Malato - La Grande Grève.djvu/282

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vait voir sur la route qu’elle avait parcourue, et qui se déroulait en un long ruban au milieu de la campagne, si on venait à sa recherche du côté de Véran. Devant elle, c’était la ligne verte et molle de collines boisées, se succédant jusqu’à Gênac ; à droite et à gauche, des fossés longés de haies.

Céleste se reposa deux heures sans oser dormir, rajusta ses vêtements pour n’avoir pas l’air d’une fugitive ou d’une folle. Puis elle reprit sa marche, traversant rapidement les villages, s’efforçant d’être vue le moins possible.

Vers trois heures de l’après-midi seulement, elle fit halte, but à un ruisseau et croqua deux poires ramassées au pied d’un arbre. Puis, de nouveau, elle repartit.

À la brune, elle arriva à Gênac et, exténuée de fatigue autant que de faim, se laissa aller à acheter un pain d’un sou chez le boulanger.

— Y a-t-il encore loin d’ici au Brisot ? demanda-t-elle en payant.

— Encore une dizaine de kilomètres, répondit le marchand. Vous feriez bien de coucher à Gênac : il y a la Belle Aventure, à dix minutes d’ici, où on loge à la nuit pour pas cher.

— Merci, fit Céleste en se retirant.

Payer une chambre si bon marché que ce fût, c’était encore trop cher. D’autre part, elle se sentait trop lasse pour faire encore dix kilomètres : les jambes lui rentraient dans le corps. Puis que ferait-elle au Brisot en y arrivant la nuit, s’exposant, en outre, à être ramassée par la police municipale ? Au moins, à Gênac, c’était encore la campagne : elle pourrait trouver un coin sous bois pour y dormir.

Céleste passa donc cette nuit encore à la belle étoile, sous un hallier où elle dormit d’un sommeil pesant jusqu’au lendemain matin. En se réveillant, elle aperçut, proche d’elle, l’enseigne d’une masure