— Qu’est-il arrivé ? Je vous en supplie, dites-le-moi… Mon mari n’est pas rentré.
La mère Bichu réprima à peine un petit rire méchant et répondit avec une hypocrite pitié toute chrétienne :
— C’est vrai, ma pauvre enfant… j’oubliais que votre mari a de mauvaises idées et qu’il devait être de la bande… C’est bien malheureux pour vous, car l’affaire est grave ; il paraît qu’ils ont détruit la chapelle du bois de Varne et qu’ils voulaient tout faire sauter à Mersey… Comment votre mari a-t-il pu aller avec ces gens-là ! Enfin, les voilà tous coffrés !
Geneviève était demeurée foudroyée, frappée au cœur.
La mère Bichu, ricanante, la regarda s’éloigner.
— Voilà tout de même comment finissent tôt ou tard ceux qui n’ont pas la crainte de Dieu ! murmura-t-elle.
Cependant Geneviève continua de courir vers Mersey. Tout d’un coup, en traversant le faubourg de Vertbois, elle se rappela qu’elle venait de passer devant la demeure de Vilaud. Peut-être là pourrait-elle apprendre ce qu’était devenu son mari.
Elle revint sur ses pas et s’arrêta devant la maison du mineur, une petite maison basse, à deux étages. Vilaud habitait une pièce du rez-de-chaussée, sa fenêtre donnait sur la route. La jeune femme frappa aux volets.
Dès le premier coup, une voix mal assurée répondit :
— Qui est là ?
On s’était donc réveillé de bonne heure, ou peut-être même ne s’était-on pas couché dans cette maison-là. Geneviève répondit :
— Jeanne, ouvrez-moi ! C’est moi… Geneviève Détras.
Le volet s’ouvrit aussitôt. La figure de Mme Vilaud, personne de trente-cinq ans, apparut inquiète.