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Page:Malato - Révolution chrétienne et Révolution sociale, Savine, 1891.djvu/111

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Europe : les châteaux s’écroulent, les villes brûlent, les populations sont fauchées. De longs hurlements emplissent cette nuit du moyen âge qui commence.

Les puissants, pris de rage, s’enferment dans leurs palais et y multiplient leurs orgies ; le peuple s’étourdit dans les disputes théologiques ; des hommes épouvantés et que gagne le mal de l’époque, une tristesse indéfinissable, annoncent la fin du monde et se retirent dans des solitudes.

Fleur sépulcrale, le christianisme, épanoui sur le tombeau du monde romain, conservera ce cachet de mélancolie amère, propre d’ailleurs aux religions idéalistes.

Michelet a bien fait ressortir ce morne sentiment qui, pendant des siècles, sépara l’homme de la nature, lui fit méconnaître et haïr cette terre considérée comme un lieu de passage, comme une vallée d’épreuves.

Dans les cités, demain ruinées, où l’orgie bat son plein, le christianisme triomphant est lui-même gangrené par la morale et les superstitions païennes. Les effervescences d’idées ou de sentiments ne sont pas durables : tôt ou tard, l’équilibre tend à se rétablir, la fusion à se faire entre les conceptions encore vagues de l’avenir et les dogmes ébranlés de la veille. Le peuple, qui ne peut se passer de déesse, érige des autels à la mère de Jésus : voici Minerve, Diane et Vénus remplacées ; les apôtres de la foi, deviennent, sous l’épithète de saints, des sortes de demi-dieux : Pierre, Paul, Jacques, Étienne détrônent Hercule et Thésée. On comprend, en partie, l’acharnement déployé dans les conciles par des docteurs