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Page:Malato - Révolution chrétienne et Révolution sociale, Savine, 1891.djvu/202

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ments une action directe : les révolutions ne se décrètent pas. Mais si l’Internationale, en dépit des naïfs qui lui prêtaient des armées et des millions, eut à peine les ressources nécessaires pour soutenir quelques journaux intermittents et donner à des grévistes une aide précaire, elle mit en lumière tout le travail qui s’était fait, depuis un siècle, au sein du prolétariat ; dans ses Congrès, elle analysa scrupuleusement les théories des penseurs, les passa au crible, pour les jeter ensuite, élucidées, dans la foule ; elle fut le drapeau déployé du socialisme : l’effet moral fut immense.

Napoléon III, qui ne savait pas au juste ce qu’il voulait hormis jouir, — Trimalcyon singeant Hamlet ! — et cherchait à faire prendre son creux pour de la profondeur, ne se montra pas défavorable au développement de l’Association. Il espérait que, de même qu’il avait conquis le paysan, il conquerrait l’ouvrier. « Je suis le plus socialiste de mon empire », répétait-il souvent. Socialisme qui se manifestait par l’encasernement des pauvres dans des cités ouvrières, par des fêtes accommodant au goût moderne les priapées antiques, par des travaux d’édilité livrant la capitale aux riches et refoulant les prolétaires dans la périphérie, assurant l’ordre en rendant impossible la construction de barricades dans les rues droites et larges, désormais ouvertes au canon et à la cavalerie, — travaux qui produisaient, par l’énorme circulation du numéraire, un bien-être momentané, mais creusaient pour l’avenir un déficit formidable. Il ne vit pas, ce philanthrope décembriseur, que l’ouvrier de 1864 n’était déjà plus cet