Aller au contenu

Page:Malato - Révolution chrétienne et Révolution sociale, Savine, 1891.djvu/203

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ouvrier naïf de 1848, grisé de sentimentalisme religieux, de légendes mélodramatiques, croyant tout, ne sachant rien, merveilleusement préparé, du reste, par les chansons de Béranger et les romans d’Eugène Sue à se vautrer aux pieds d’un Napoléon qui jouerait au prince Rodolphe. Il pensa que l’Internationale, ouvrant un champ d’études aux socialistes, les détournerait de l’action. Dans les dernières années de son règne, il put s’apercevoir de l’erreur qu’il avait commise et juger combien l’opposition énergique des Millière, des Varlin, des Vermorel, des Lefrançais était autrement dangereuse que les bouderies des royalistes ou les déclamations des romantiques.

Les républicains bourgeois virent avec défiance se créer l’Internationale. Habitués, de tout temps, à considérer le peuple comme un troupeau destiné à les suivre, ils ne pouvaient concevoir que ces bêlants voulussent enfin raisonner et discuter eux-mêmes leurs intérêts. Parmi ces bergers, les uns démocrates à l’eau de rose, coquetant avec l’orléanisme, se confinaient dans une opposition platonique à l’empire ; Émile Ollivier, le démagogue rallié, leur avait montré la voie à suivre. Quelques-uns d’entre eux, comme Jules Simon, tâtèrent de l’Internationale, espérant y dominer et s’en faire un tremplin, grâce à leur léger bagage de science économique. Quand ils virent que, décidément, ce mouvement les dépasserait, ils se dégagèrent. Les autres, qui se réclamaient de la révolution, sans préciser s’ils entendaient défendre la révolution bourgeoise de 1789 ou bien ouvrir les voies à la révolution prolé-