Page:Malato - Révolution chrétienne et Révolution sociale, Savine, 1891.djvu/287

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ments pour s’affranchir : les masses longtemps ensommeillées se réveilleront.

Au cours de la Révolution française, on vit des familles nobles fuir comme des oiseaux apeurés et se bâtir un nid loin du vieux monde, dans les savanes américaines ou dans ces îles vertes et embaumées qui emperlent l’Océan indien. Le fait se reproduira encore : la mystérieuse Afrique est là qui entr’ouvre ses profondeurs. Des flots humains s’y précipiteront : aventureux, névrosés, capitalistes ruinés ne pouvant se faire à l’idée de travailler et rêvant d’exploiter les noirs après avoir exploité les blancs. Ils iront, les derniers surtout, stimulés par leur soif de gain, lutter contre l’anthropophage et le crocodile, trafiquant d’ivoire et de poudre d’or, abattant les palmiers, brûlant les cases, fauchant les populations, massacrant, massacrés : histoire fidèle de la civilisation par le meurtre, le viol et le pillage.

Au siècle prochain, les pays vierges entrevus par Stanley seront en plein bouillonnement ; des forces et des activités nouvelles s’y feront jour. Déjà, le continent noir est entamé de tous côtés : fanatiques musulmans et missionnaires chrétiens, marchands et soldats, Français, Anglais, Allemands, Espagnols, Italiens, Portugais s’efforcent de mordre au gâteau. Et le roi des Belges couve paternellement l’État indépendant du Congo qu’administrent ses officiers, qu’exploitent ses banquiers ; mais le morceau est bien gros pour un si mince convive et l’Allemagne pourrait bien mettre le holà si l’incendie socialiste ne venait brusquement, en Europe, déployer ses rouges ailes.