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bespierre. Très heureusement, le peuple vit au jour le jour et ne se passionne ni pour les choses mortes ni pour les abstractions.

Mais s’ensuit-il que les coups d’œil rétrospectifs soient sans enseignements, qu’il n’y ait pas lieu d’analyser ce qui fut ? L’étude de l’histoire[1], à notre scientifique époque, ne constitue-t-elle pas une méthode propre à nous éviter bien des déboires et à guider nos pas incertains vers un avenir que nous entrevoyons vaguement ? Connaître n’implique pas imiter, et rien plus que les leçons du passé n’est à même de mettre en garde contre la race des pasticheurs, ceux qu’on a appelés si justement les républicains en us. Soumis, comme tout ce qui respire, à l’influence des milieux, et par suite, indéfiniment modifiable, l’homme n’est, cependant, pas si différent de lui-même depuis dix-neuf siècles, qu’on n’ait intérêt à le regarder s’agiter au temps des Césars.

L’histoire nous montre comment se dénatura une révolution à la fois religieuse, civile, économique, morale, familiale.

  1. La science historique n’existe pas à l’heure actuelle, elle est tout à créer. Nul écrivain n’a encore su faire pour elle ce que Kepler, Copernic et Newton ont fait pour l’astronomie, Berthouet, Gay-Lussac, Laplace, Karl Marx, Darwin pour les autres sciences exactes : en dégager les lois, formuler les combinaisons et les mouvements appelés à se produire. Longtemps elle n’a été que la sèche nomenclature des rois et des batailles ; Michelet et quelques autres puissants vulgarisateurs l’ont animée d’un souffle de vie : leur plume ardente a évoqué l’esprit des peuples, tiré de la poussière les morts célèbres, fait revivre les siècles écoulés : ç’a été la phase brillante de vulgarisation tendant au naturalisme moderne. Aujourd’hui, reste à compléter l’œuvre et, par une analyse consciencieuse, à déduire avec une précision mathématique les causes des mouvements profonds qui agitent les molécules humaines.