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Page:Malato - Révolution chrétienne et Révolution sociale, Savine, 1891.djvu/69

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Toujours l’autorité a voulu étaler publiquement ses sanglantes répressions afin de frapper les masses d’un salutaire effroi. Les cirques devinrent la grande arène du courage chrétien. On broya, on brûla, on pendit les condamnés, on les livra aux bêtes féroces sous les yeux d’une multitude plus féroce encore, avide de spectacles et se pâmant en prostituée devant la force parce qu’elle est incapable de comprendre l’idée. Cette foule n’est-elle pas la même à travers les âges, battant des mains aux autodafés, à la Saint-Barthélemy, aux Dragonnades, aux massacres de communards, jetant sa bave aux éternels insurgés de la religion, de la philosophie ou de l’ordre social, se moquant du nom de l’hérétique pourvu qu’il y ait un bûcher allumé ? Ô atavisme que les siècles n’ont pu éteindre et qui atteste, mieux que toutes les démonstrations scientifiques, la descendance animale de l’homme !

Les gourmets purent se griser de sang : pour les distraire, on fit subir tous les genres de torture à une jeune esclave, Blandine, dont le nom est resté populaire. Un autre condamné, Attale, fut exposé dans l’amphithéâtre sur une chaise de fer rougie au feu. Eusèbe, dans son Histoire ecclésiastique, rapporte que le martyr se tordant au milieu de ses souffrances inouïes, lança aux spectateurs cette rude apostrophe : « Peuple ! ce n’est point à nous qu’il faut imputer le crime de manger des hommes ; c’est bien plutôt à toi qu’on peut reprocher celui de les faire rôtir. »

Car la crédulité idiote allait jusqu’à attribuer aux chrétiens des goûts de cannibales. Tandis que des