Page:Malato - Révolution chrétienne et Révolution sociale, Savine, 1891.djvu/72

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tant de jour en jour sur la doctrine apostolique, celle-ci conservait un fonds révolutionnaire qui la rendait redoutable aux despotes. À côté des formules mystiques, le mot magique d’égalité, démentant les idées d’obédience et de résignation, allait droit au cœur des foules qui, enivrées, enveloppaient le christianisme d’un souffle de foi brûlante. De là, vint toute sa force pendant si longtemps.

On peut considérer la fin du deuxième siècle et la plus grande partie du troisième comme la période la plus orageuse pour les chrétiens d’Europe. À partir de Marc-Aurèle, il y eut, à Rome, des persécutions qui atteignirent leur maximum de violence sous Dèce : les catacombes abritèrent de nombreux fugitifs.

Les historiens sacrés se sont complus à nous représenter les premiers adeptes de la nouvelle religion se rassemblant dans ces sombres retraites pour y entendre les prédications de leurs pasteurs et y célébrer leurs rites de plus en plus nombreux, — chaque mouvement révolutionnaire n’a-t-il pas sa partie décorative ? Mais tous les sectateurs ne s’en tenaient pas là : en dépit de la pusillanimité des évêques romains, la lutte entre les deux mondes, païen et chrétien, se manifestait fréquemment d’une façon moins platonique. La force, cette éternelle accoucheuse des sociétés, selon l’expression de Karl Marx, se mettait de la partie. Le serf auquel une voix inconnue criait : « Tu es un être raisonnable, l’égal de ton maître, fils d’un même Dieu », n’était-il pas induit à conclure : « Pas d’égalité sans liberté ? » De là à la révolte, il n’y avait qu’un pas : beaucoup