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Page:Mallarmé - Œuvres complètes, 1951.djvu/1003

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cohésives, moins absolues : AUNT, OUNT. Voyez avaunt, GAUNTLET, HAUNCH, HAUNT, TO LAUNCH (de lancer) ; TAUNT (de tancer) ; tawny (de tan, fauve) ; to vaunt {se vanter) ; etc. Ainsi, to announce, to bound {bondir) ; bounty, country counter {part) ; to found {fonder) ; mount, ounce, pro-found, counter {rencontre) ; to renounce ; etc. Renom fait renown, un W remplaçant l’(7; et quant à frontier {frontière), il est presque seul à demeurer. Telle, cette véritable corruption, dans leur matière, de deux des plus beaux sons de notre langue, dissous par l’introduction habile d’une lettre. Ceci généralement à l’intérieur des mots : AN, en terminaison, précédé d’un D, comme dans ERRAND, commission, ou d’un T, ainsi que dans fragrant, embaumé, se prononce tout bonnement à l’anglaise, c’est-à-dire A du nez et N avec le D ou le T isolés; quant à ON final, il ne subit de défaite qu’après avoir vu sa voyelle dûment doublée en diphthongue, ce qui procède fort, à vrai dire, du traitement employé tout-à-l’heure. Regardez balloon, buffoon {bouffon) ; cartoon, dragoon (le dragon militaire); festoon, galloon, iiarpoon, macaroon, ma-roon (la couleur et le nègre fugitif) ; moussoon {mousson, le vent) ; mousçhjetoon, pantaloon, platoon {peloton militaire) ; poltroon, pontoon, quadroon (un quarteron) ; saloon; etc. L’habitude française d’accentuer de la voix la dernière syllabe se montre visiblement la cause de cette réduplication : seul, griffin, pour griffon, où toute l’attaque porte sur le commencement, 11e suffit pas à démentir cette assertion. Pas de consonne française, ou même de geste vocal plus complexe, que ne figure, à la faveur d'une lettre ou de plusieurs, l’Anglais : sauf L mouillée. Altérer l’émission d’un grand nombre de nos vocables, en y prononçant les deux LL comme une seule qui, elle-même, reprend son articulation ordinaire ? faux-fuyant trop aisé : car si notre cas consiste en la modulation d’un I invisible et très faible après l’L simple ou double, c’est que ladite lettre apparaît toujours écrite avant. Lire éventa-i-l, ve-i-lle, fam-i-lle et dépou-i-lle. Trois solutions s’offrent à un organisme étranger rebelle : de faire disparaître cet I, comme dans apparel, corbel, counsel et marvel, pour E; et mall (un mail), medal, portal, rascal (coquin, de racaille), represal, avec A : ou de lui faire rejoindre, en formant une diphthongue, la voyelle précédente, comme detail, en-trails, etc. (prononcez ai-1). Que si une langue cède et se plie à imiter l’autre, ce sera, précisément, en déplaçant le même i d’avant après, e’est-à-dire en figurant notre prononciation, ainsi qu’elle a été plus haut analysée : medallion, palliasse (une paillasse), pavilion, valiant